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LÉON TOLSTOÏ

Natacha, elle aussi, est pour ainsi dire faite d’après nature. Plusieurs traits de l’héroïne ont été empruntés par Tolstoï à sa belle-sœur, la sœur cadette de la comtesse : Tatiana Andréievna Kouzminsky. On retrouve aussi en elle quelques traits de la comtesse Sophie Andréievna.

Voici du reste comment Tolstoï s’exprimait, parlant de Natacha :

« J’ai pris Tania, l’ai pilée avec Sonia, et il en est sorti Natacha. »

Cette même « Tania » nous écrit dans une récente lettre :

« Je me les rappelle très bien, tous les deux, pendant qu’il écrivait Guerre et Paix. Il était toujours plein d’envolée, high spirit, comme disent les Anglais, courageux, bien portant, gai. Les jours qu’il ne travaillait pas, il allait à la chasse avec moi, et souvent avec le voisin, Bibikov… Je me rappelle que l’on voyait toujours à son humeur comment marchait son travail. Quand tout marchait bien, il était animé et gai et disait qu’il avait laissé dans l’encrier un petit morceau de sa vie. Le soir, il faisait la grande patience, dans la chambre de sa tante, et ses réussites avaient toujours trait à son roman.

« Sa collaboratrice fidèle était Sophie Andréievna, qui recopiait ses brouillons. Le travail de Léon Nicolaievitch exigeait beaucoup de corrections et de nouvelles copies, de sorte qu’en comptant tout on peut dire que Sophie Andréievna a recopié Guerre et Paix sept fois. »

Sur la comtesse aussi ce travail agissait d’une façon ennoblissante. Voici ce qu’elle écrivait entre