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VIE ET ŒUVRE

qui reculait devant une opération délicate. Les uns, en effet, déclaraient que de simples massages suffiraient pour amener la guérison complète ; d’autres affirmaient la nécessité d’une nouvelle opération et parmi ceux-ci les uns soutenaient la bénignité de l’opération, les autres déclaraient que c’était une opération très délicate, que le bras pourrait rester plus court que l’autre, etc. Dans cette indécision, Tolstoï passa toute une semaine. C’était la première fois que Tolstoï quittait sa jeune famille pour aussi longtemps, aussi cette séparation leur causait-elle beaucoup de tristesse, et elle provoqua entre eux un échange de lettres affectueuses.

Par exemple le 26 novembre 1864, la comtesse Tolstoï écrit à son mari :

« Ainsi nous sommes séparés. Il y avait des souffrances, mais aussi des joies, et cette fois c’est un chagrin sérieux qu’il faut savoir supporter. Comment allez-vous tous, là-bas ? Te sens-tu bien ? Ne pense pas à moi, fais tout pour passer gaiement le temps. Va au club et chez les amis, chez qui tu voudras, maintenant je suis tout à fait rassurée. Je suis si heureuse avec toi et suis si sûre de toi, je ne crains rien au monde, je te le dis sincèrement, et il m’est très agréable de le sentir. Chez nous tout va comme auparavant sans le moindre changement. Je passe tout mon temps en bas ; c’est là mon royaume, mes enfants, mes occupations, ma vie. Quand je monte en haut, il me semble que je suis en visite ; quand je rentre, Serge se lève. En mon absence il plaisante et blague, et en ma présence ce sont des cérémonies, bien qu’il soit très aimable avec moi. Je sens que pour eux tous je suis une