Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/427

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
401
VIE ET ŒUVRE

Mais le même jour, sentant qu’elle a dû peiner son mari, elle lui écrit :

« Tout d’un coup tu t’es représenté si clairement à moi et j’ai senti en moi un tel accès de tendresse pour toi ! Il y a en toi quelque chose de si sage, de si bon, de si naïf, de si persévérant, tout cela éclairé par la lumière de la bonté, et ce regard qui va droit à l’âme. Et cela n’appartient qu’à toi seul[1]. »

Néanmoins, l’intention de Tolstoï de prendre en main la direction de la maison ne se réalisa point, et en novembre il rentrait de nouveau à Moscou.

Ce même mois de novembre, il se passa dans ma vie un événement qui la changea radicalement. Le 21 novembre 1884, je fis la connaissance de L. N. Tolstoï. Ce fut mon ami V. G. Tchertkov qui m’amena chez lui. Je connaissais Tchertkov depuis quelque temps, par lui j’avais appris à aimer les œuvres de Tolstoï, et en lui, pour la première fois de ma vie, j’avais rencontré l’homme répondant à ma conception du vrai chrétien. Cette conception s’était formée en moi dans ma jeunesse, nullement sous l’influence de Tolstoï dont je ne connaissais pas encore les œuvres, et en général, en dehors de l’influence laïque. Cette conception était née tout simplement de la lecture des évangiles et de la méditation de son vrai sens dans l’application de la vie.

Tchertkov m’emmena chez Tolstoï, à Moscou, et nous passâmes ensemble la soirée du 21 novembre. J’ai noté alors l’impression que j’emportai de cette soirée :

  1. Archives de la comtesse S. A. Tolstoï.