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LÉON TOLSTOÏ

parti. Tout s’est passé très amicalement. Probable qu’aujourd’hui on m’infligera deux cents roubles d’amende, et je ne sais pas si ce sera fini avec cela. Je crois que oui. Je suis vraiment convaincu que je ne pouvais agir autrement. Je t’en prie, ne te fâche pas que je ne t’aie pas dit que j’étais nommé juré. Je te l’aurais dit si tu me l’avais demandé, si l’occasion s’en était présentée ; mais après, je ne voulais pas te le dire. Tu te serais émotionnée, tu m’aurais troublé, je t’inquiète assez sans cela, et à tout prix je voulais être calme. Je désirais rester ou retourner à Iasnaïa, j’avais pour cela une raison. Ainsi, je t’en prie, ne te fâche pas. J’aurais pu n’y pas aller du tout, l’amende eût été la même, et j’aurais été convoqué de nouveau. De cette façon, au contraire, j’ai dit une fois pour toutes que je ne pouvais pas être juré. J’ai dit cela très doucement. Je n’ai vu personne de la magistrature. »

Ce fait se passa le 28 septembre 1883.

À cette époque, l’intérêt intellectuel de Tolstoï était tout entier porté sur son œuvre capitale : En quoi consiste ma religion, et sur la lecture des œuvres de Tourgueniev. Le directeur de la revue la Pensée russe, Uriev, s’adressa à Tolstoï, au nom de la Société des amateurs des Lettres russes, le priant de vouloir dire quelque chose sur le célèbre écrivain, dans la séance solennelle de la société. Tolstoï accepta cette invitation et, pour raviver ses impressions, se mit à relire l’œuvre de Tourgueniev.

« Ma vie, écrit-il de Iasnaïa, à sa femme, est réglée comme une pendule. Je me lève à neuf