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LÉON TOLSTOÏ

phiées, etc., Tourgueniev, qui lut aussi l’ouvrage, écrivit à Grégorovitch :

« J’ai reçu ces jours-ci, par une charmante dame de Moscou, les Confessions de Tolstoï, que la censure a interdites. C’est une œuvre remarquable par la sincérité, la vérité et la force de conviction, mais elle est entièrement basée sur des idées fausses, et, à la fin des fins, aboutit à la négation la plus sombre de toute vie vraiment humaine. C’est aussi, en son genre, du nihilisme… Je suis étonné que Tolstoï qui nie, entre autres, l’art, s’entoure d’artistes, et je me demande ce qu’ils peuvent tirer de sa conversation ? Et, malgré tout, Tolstoï est peut-être l’homme le plus remarquable de Russie. »

Ce serait une erreur de croire que le nouvel état religieux de Tolstoï eût pour conséquence une humeur triste et sombre. Il n’était tel qu’au moment de lutte aiguë contre les séductions qui l’entouraient, mais, dès qu’il retrouvait son équilibre moral, il redevenait gai et plein d’entrain, et volontiers prenait part aux amusements de la famille. Précisément cette année-là, en 1882, l’un des amusements était celui de la boîte aux lettres. Mme T. A. Kouzminsky nous a raconté ainsi en quoi il consistait :

« Comme nos deux familles étaient très nombreuses, et qu’il y avait beaucoup de jeunes gens de quinze à vingt ans, il se passait beaucoup de petits incidents, et souvent on avait le désir de dévoiler quelques petits secrets, de louer ou de blâmer quelqu’un ou quelque chose. C’est alors qu’on