Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/35

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
27
VIE ET ŒUVRE

et avons dit : « Voilà ce qui serait bien. Allons chez Fet ! » Et nous serions venus sans le mal de gorge de Tania, qui l’a mise en danger et la tient encore alitée, sans la maladie de Serioja et sans la grossesse de Sophie, qui en est au huitième mois. Après mûre réflexion nous avons décidé qu’il n’était pas possible d’entreprendre un voyage pareil. Mais moi je désire et espère être des vôtres… »

Malgré tous ces soucis de famille, Tolstoï avait alors une passion qui les lui faisait oublier momentanément. C’était la chasse. Il l’avoue lui-même à sa femme, en réponse à une lettre dans laquelle la comtesse lui reprochait sa longue absence.

En août 1864, c’est-à-dire la deuxième année de leur mariage, il lui écrit :

« … Tu dis que je vous oublierai. Pas pour un instant, surtout avec les gens. À la chasse, j’oublie parfois, je ne pense qu’à la bécasse. Mais avec les gens, à chaque mot, je songe à toi, et veux toujours dire ce que je ne peux dire à personne excepté à toi[1]. »

Ce même mois d’août, au cours d’un de ces voyages, Tolstoï fut témoin d’un terrible et étrange accident. Il écrit à sa femme :

« … Un terrible accident qui m’a frappé profondément. La femme qui s’occupait du bétail avait laissé tomber le seau dans le puits de la cour des chevaux. Le puits n’a que douze archines. Elle s’assit sur la perche et demanda à un paysan de la descendre par la corde. — Ce paysan, le staroste, ma seule connaissance à Nikolskoie, un très gentil

  1. Archives de la comtesse S. A. Tolstoï.