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VIE ET ŒUVRE

donna point de chambre et nous envoya au dortoir commun, qui était très sale, et où il y avait des insectes. — « Petit père, dis-je au moine, voici un rouble pour vous, mais donnez-nous une chambre. » Il nous donna une chambre, et nous prévint que nous y serions trois. Notre compagnon était un cordonnier du district de Bolkov. Je sortis de mon sac le drap et l’oreiller et préparai le lit du comte sur le divan. Le cordonnier se coucha sur l’autre divan, et moi, je me fis un lit sur le parquet, près du comte.

« Bientôt le cordonnier s’endormit et se mit à ronfler si fort que le comte se souleva effrayé et me dit : — « Réveille cet homme et demande-lui de ne pas ronfler. » Je m’approchai du divan et éveillai le cordonnier. — « Mon cher, vous ronflez trop ; vous effrayez mon vieux », lui dis-je, « il a peur quand, dans la même chambre que lui, un homme ronfle. »

— « Alors, à cause de ton vieux, moi je ne dois pas dormir de la nuit », fit-il. En tout cas, il ne ronfla plus.

« Le lendemain, nous nous levâmes à dix heures. Nous prîmes le thé, puis j’allai à la messe, et le comte alla voir comment les moines fauchaient et labouraient.

« Bientôt, je ne sais comment, les moines apprirent que leur couvent abritait le comte L. N. Tolstoï. Sur l’ordre du supérieur et du père Ambroise, on se mit à sa recherche. Quelqu’un, par hasard, me demanda qui était avec moi à l’hôtel :

— « Qui cherchez-vous ? » — « Le comte Tolstoï. »

— « Je suis son domestique. » Sur mes indications ils trouvèrent le comte et l’invitèrent à venir souper chez le supérieur. Le comte arriva à l’hôtel-