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LÉON TOLSTOÏ

encore de toi, révèle-moi tout ce que je puis comprendre de toi et de moi !

« Et Dieu bon, le Dieu de vérité, me répond par la voix de l’Église, « Dieu est unité, Dieu est trinité ».

« Mais allez au diable, vous qui avez pris les clefs du royaume du ciel et, sans y entrer, le fermez aux autres ! Ce n’est pas de Dieu que vous parlez, mais de quelque autre chose. »

Continuant son étude, Tolstoï donne un récit intéressant de l’histoire biblique de la chute d’Adam.

« Le sens de toute cette histoire, selon le livre de la Genèse, est tout à fait contraire à celui de l’Église, et serait le suivant : Dieu créa l’homme, mais voulut le laisser, comme les animaux, ignorant du bien et du mal. C’est pourquoi il lui défendit de manger le fruit de l’arbre de la science du bien et du mal. En même temps, pour effrayer l’homme, Dieu le trompa, lui disant que s’il en mangeait il mourrait. Mais l’homme, aidé de la sagesse (le serpent), déjoua la tromperie de Dieu. Il connut le bien et le mal et ne mourut point. Dieu, effrayé de cela, lui interdit l’accès à l’arbre de la vie, auquel, selon le sens de l’histoire, l’homme trouvera l’accès comme il le trouva pour la connaissance du bien et du mal. Cette histoire est-elle bonne ou mauvaise ? en tout cas elle est ainsi dans la Bible. L’attitude de Dieu est ici semblable à celle de Zeus envers Prométhée. Le Dieu de ces premiers chapitres n’est pas le Dieu chrétien, ce n’est pas même le Dieu des prophètes et de Moïse. C’est un Dieu jaloux de son pouvoir sur les hommes, et craignant les hommes. Cette histoire, la théologie en avait besoin pour