Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 3.djvu/267

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
249
VIE ET ŒUVRE

occupations, se pose les buts les plus larges et les plus nobles. L’importance qu’il attribuait déjà à son monde intérieur moral apparaît dans cette note de son journal : « Un changement dans la manière de vivre doit se produire. Mais ce changement ne doit pas être le résultat des circonstances extérieures, mais le produit de l’âme. » Avec de telles pensées, Tolstoï quitte l’Université, va à Iasnaïa Poliana et rentre dans la vie indépendante.


Voyons maintenant quelles sources nourrirent l’âme de Tolstoï pendant ses jeunes années. Dès les premiers jours de sa vie, il éprouva sur lui le sentiment puissant de l’amour maternel. Dans ses souvenirs, Tolstoï, parlant de sa mère, dit : « Le quatrième sentiment fort qu’eut ma mère était, au dire de ma tante, et je désirais tant que cela fût vrai, était son amour pour moi, qui remplaça l’amour pour Coco, séparé de ma mère au moment de ma naissance et remis entre des mains viriles. »

À l’âge de dix-huit mois, il resta avec sa tante Tatiana Alexandrovna Ergolski, dont il dit dans ses souvenirs :

« Elle eut l’influence la plus grande sur toute ma vie. Son influence fut en cela que, dès l’enfance, elle m’apprit le plaisir moral de l’amour. »

Puis ce fut l’influence du gouverneur allemand, Feodor Ivanitch Rossel, dont la vie triste et isolée fit germer en lui la compassion. Celle du père, bien que moindre, ne fut pas cependant négligeable. Tolstoï garde de lui le souvenir d’une grande bonté. Particulièrement grande était l’influence de son frère Nicolas qui, avec ses cadets, organisait des