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LÉON TOLSTOÏ

Tolstoï venait de rentrer de Samara avec toute sa famille. Quelques jours plus tard, il recevait le télégramme que Tourgueniev serait à Iasnaïa le 8 août. Tolstoï partit pour l’attendre à Toula, accompagné de son beau-frère, S. A. Bers. Pour les détails de cette rencontre, nous trouvons des renseignements dans les souvenirs de Bers, dans les notes de la comtesse Sophie Andreievna et dans quelques autres sources.

« Tourgueniev est très blanc, écrit la comtesse Tolstoï. Il est très modeste. Il nous a tous étonnés par son éloquence et son talent à exposer les sujets les plus simples comme les plus élevés. Il nous a décrit la statue du Christ, d’Antokolosky, comme si nous l’avions vue. Ensuite, avec le même art, il nous a parlé de son chien favori Jack. En Tourgueniev, on remarque maintenant la faiblesse : une faiblesse naïve de caractère. On voit aussi en lui la douceur et la bonté. Toute sa querelle avec Léon Nicolaiévitch m’a été expliquée par cette faiblesse. Par exemple, il avoue naïvement qu’il a très peur du choléra. Ensuite, comme nous étions treize à table, nous avons plaisanté : qui la mort choisira-t-elle et qui en a peur. Tourgueniev en riant leva la main et dit : « Que celui qui craint la mort lève la main. » Personne ne la leva, seul Léon Nicolaiévitch, par politesse, leva la main et dit : « Eh bien, moi aussi, je ne veux pas mourir[1]. »

S. A. Bers, dans ses Souvenirs, ajoute :

« Pendant le dîner, Ivan Serguéievitch causa beaucoup, imitant non seulement les hommes, mais les

  1. Archives de la comtesse S. A. Tolstoï.