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LÉON TOLSTOÏ

Dans la lettre suivante, il exprime plus clairement son idée :

« Vous voulez me lire une nouvelle sur les mœurs de la cavalerie. Je pense que c’est bien si c’est écrit simplement, sans recherche de situations et de caractères. Moi je ne veux rien vous lire car je n’écris rien, mais je désire vivement causer avec vous de Shakespeare, de Gœthe, et, en général, du drame. Tout cet hiver je me suis occupé presque exclusivement du drame, et comme il arrive toujours aux hommes qui, jusqu’à l’âge de quarante ans, n’ont pas réfléchi à un certain sujet, n’en ont aucune idée, tout d’un coup, avec la clarté de leurs quarante ans, ils font attention à ce sujet négligé, et il leur paraît toujours qu’ils y voient beaucoup de choses nouvelles. Tout cet hiver, je n’ai fait que dormir, jouer au bésigue, patiner, courir, mais j’ai surtout gardé le lit (malade), et quand je suis là, les personnages du drame ou de la comédie commencent à agir. Et ils le font très bien. C’est de quoi je veux vous parler. En cela comme en tout, vous êtes un classique et vous comprenez très profondément le sens des choses. Je voudrais aussi lire Sophocle et Euripide. »

Tolstoï avait conçu le projet d’écrire un drame historique et s’était arrêté à l’époque de Pierre ier. Malheureusement, de ce drame Tolstoï n’écrivit qu’une scène : la réunion des Strelitz. L’une des causes qui le firent abandonner ce drame, ce fut le manque de sources où se documenter. Mais l’époque de Pierre l’intéressait de plus en plus, et en 1872, dès qu’il se fut débarrassé du Syllabaire, il commença un grand roman. D’après les lettres