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LÉON TOLSTOÏ

tude de ses facultés mentales : c’est le cas de Chibounine, ou d’appliquer les art. 109 et 116, qui atténuent la peine. Ce dernier parti me semble plus conforme à la justice et à la loi : le sens de l’art. 109 s’appliquant à tous les articles suivants et par conséquent à l’art. 604, lequel ne dit pas qu’il infirme les articles 109 et 116. Le tribunal ne peut que choisir entre l’article 109, qui atténue la peine, et l’art. 604, qui ne fixe qu’un seul châtiment, le tribunal doit ou s’écarter de la lettre de l’art. 109 ou de celle de l’art. 604.

« Pour se décider dans ce choix le tribunal ne peut se guider que de l’esprit de toute notre législation, qui toujours incline la balance de la justice du côté de la miséricorde, et de l’art. 81, qui dit que le tribunal doit se montrer plus miséricordieux que cruel, se souvenant que les juges sont aussi des hommes. Avec ce grand et rigide rappel de la loi, l’accusé remet son sort à la décision de la justice ».

Chibounine fut condamné à mort. Cette nouvelle se répandit rapidement dans les bourgs et les villages voisins. Une foule de gens vinrent pour voir le condamné, mais on ne permit pas de voir « le malheureux ». Malgré cela, ils ne l’abandonnèrent point, qui lui faisait remettre un pot de lait, qui des œufs, qui des gâteaux, etc.

L’exécution eut lieu le 9 août. Le condamné, les yeux baissés, le visage immobile, marchait d’un pas ferme, sans dire un mot. Une foule nombreuse entourait le poteau d’exécution ; des femmes sanglotaient et s’évanouissaient.

Après l’exécution, les gens coururent sur la tombe