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VIE ET ŒUVRE

artistique. Je voulais, par exemple, que le paysan qui avait accueilli le vieux dans sa maison se repentît lui-même de sa bonne action ; eux trouvaient cela impossible et ils créèrent une méchante femme. Je dis :

« — D’abord le paysan a eu pitié du vieux, ensuite il a regretté le pain. » Fedka répondit que ce n’était pas bien. — « D’abord il n’a pas obéi à sa femme, et après il ne voulait plus se soumettre. »

« — Mais quel homme est-il selon toi ? demandai-je.

« — Lui ? Comme l’oncle Timothée, répondit Fedka en souriant ; une petite barbiche, il va à l’église et élève des abeilles.

« — Il est bon, mais têtu ? demandai-je.

« — Oui, répondit Fedka, il n’obéira pas à la femme.

« Arrivés au passage où l’on amène le vieux dans l’izba, le travail devint très animé.

« Ici, évidemment pour la première fois, ils sentaient le charme de l’impression par la parole d’un détail artistique.

« Sous ce rapport surtout se distinguait Siomka : les détails les plus sûrs se succédaient. Le seul reproche qu’on pouvait lui faire c’est que ces détails restaient le présent, sans lien avec la marche générale de la nouvelle. Je ne pouvais pas écrire et leur demandai d’attendre et de ne pas oublier ce qui avait été dit. Siomka semblait voir et dépeindre ce qui se trouvait devant ses yeux : les lapti gelés,