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VIE ET ŒUVRE

hommes. Dès la jeunesse ils apprennent en travaillant et garantis du côté matériel de la vie, c’est-à-dire sûrs du morceau de pain, du vêtement et du gîte. Et regardez un étudiant détaché de la maison, de la famille, abandonné dans une ville étrangère, remplie de tentations pour son âge, sans moyens d’existence (parce que les parents donnent l’argent seulement pour le nécessaire et que cet argent est dépensé pour le plaisir), dans le cercle des camarades dont la société ne fait qu’augmenter ses défauts, sans guide, sans but, détaché du milieu ancien sans s’incorporer au milieu nouveau.

« Voilà, à de rares exceptions près, quelle est la situation des étudiants. De ce milieu sortent ou des fonctionnaires, bons seulement pour le gouvernement, ou des professeurs-fonctionnaires, ou des littérateurs-fonctionnaires, utiles seulement à la société, ou des hommes arrachés sans aucun but à leur ancien milieu, leur jeunesse gâtée, et qui ne trouvent pas de place dans la vie, ce qu’on appelle chez nous les hommes à l’instruction universitaire, des hommes développés, c’est-à-dire des libéraux irritables, maladifs. L’université est notre premier et principal établissement d’éducation. Elle s’approprie en premier lieu les droits d’éducation, et la première, d’après les résultats qu’elle atteint, elle prouve l’illégitimité et l’impossibilité de l’éducation. Ce n’est qu’au point de vue social qu’on peut justifier les résultats de l’éducation universitaire. L’université prépare non des hommes dont l’huma-