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VIE ET ŒUVRE

« Nous Russes, que devons-nous donc faire actuellement ? Faut-il que nous tombions tous d’accord et adoptions l’opinion française, allemande ou américaine sur l’instruction, et une de leurs méthodes ? Ou, nous cantonnant dans la philosophie et la psychologie, devons-nous découvrir ce qu’il faut, en général, pour développer l’âme humaine et préparer, parmi les jeunes générations, les meilleurs hommes, selon nos conceptions ? Ou profiter de l’expérience de l’histoire, non en imitant les formes élaborées par celle-ci, mais en comprenant les lois que l’humanité a élaborées par ses souffrances, et dire loyalement que nous ignorons et ne pouvons savoir ce qui est nécessaire aux futures générations, que nous nous sentons obligés d’étudier, que nous désirons étudier ces besoins, que nous ne voulons pas accuser d’ignorance le peuple qui n’accepte pas notre instruction, mais que nous-mêmes, nous nous accusons d’ignorance et d’orgueil si nous pensons instruire le peuple à notre façon ?

« Cessons donc d’envisager l’opposition que fait le peuple à notre instruction comme un élément hostile à la pédagogie. Au contraire, voyons là l’expression de la volonté du peuple qui seule doit guider notre activité. Reconnaissons enfin cette loi qui nous dit si clairement, et par l’histoire de la pédagogie et par l’histoire générale de l’instruction, que pour savoir ce qui est bon et ce qui ne l’est pas, celui qu’on instruit doit avoir le plein pouvoir d’exprimer son mécontentement, ou, au moins, d’es-