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VIE ET ŒUVRE

tique, et d’après l’alphabet emprunté à l’allemand, ou d’après le livre de prières ?

« Un certain flair pédagogique dont je suis doué et surtout la participation directe et passionnée que je pris à cette œuvre m’ont aidé à résoudre ces questions, en me mettant d’un coup en contact le plus intime, le plus immédiat, avec les quarante petits paysans qui formaient mon école. (Je les appelle des petits paysans parce que j’ai trouvé chez eux ces traits de sagacité, cette forte dose de savoir, donné par la vie pratique, cette humeur plaisante, cette simplicité, ce dégoût pour tout ce qui est faux, qui distinguent en général le paysan russe). Aussitôt que je me rendis compte de leur aptitude à acquérir les connaissances dont ils avaient besoin, je sentis que l’ancienne méthode ecclésiastique de l’enseignement était surannée et ne valait plus rien pour eux, et je me mis à essayer les autres méthodes d’enseignement. Mais comme la contrainte dans l’enseignement me répugne, par conviction et par caractère, je ne les contraignais en rien et dès que je remarquais qu’ils n’acceptaient pas volontiers certaines choses, je n’insistais pas et cherchais un autre biais.

« De ces expériences, il résulta pour moi et pour les maîtres qui travaillaient avec moi à Iasnaia Poliana et en d’autres écoles et plaçaient à la base de l’enseignement la liberté, que presque tout ce qu’on écrit pour les écoles dans le monde pédagogique est séparé de la réalité par un gouffre infini