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LÉON TOLSTOÏ

sermons quotidiens dans les églises ; j’ai visité des salles d’asiles dans lesquelles des enfants de quatre ans, au coup de sifflet, comme les soldats, font le tour des bancs, et, sur un signal, lèvent et plient les bras, et, d’une voix tremblotante et étrange, chantent des hymnes à Dieu et à leurs bienfaiteurs ; et je me suis convaincu que les institutions scolaires de Marseille sont très mauvaises. Si quelqu’un, par miracle, voyait tous ces établissements sans voir le peuple dans les rues, dans les ateliers, les cafés, à la maison, quelle opinion se ferait-il d’un peuple élevé de telle façon ! Il penserait, probablement, que c’est un peuple grossier, ignorant, hypocrite, plein de préjugés et presque sauvage. Mais il suffit d’entrer en relations, de causer avec quelques hommes du peuple, pour se convaincre qu’au contraire le peuple français est presque tel qu’il se croit : habile, intelligent, sociable, libre-penseur, et, en effet, civilisé.

« Regardez un ouvrier de la ville, d’une trentaine d’années : il sait écrire une lettre avec moins de fautes qu’à l’école et, parfois même, tout à fait bien ; il a une idée de la politique et alors de l’histoire et de la géographie modernes. D’après les romans, il sait un peu d’histoire, possède quelques notions des sciences naturelles ; très souvent il dessine et applique des formules mathématiques à son métier. Où donc a-t-il acquis tout cela ?

« J’ai trouvé spontanément cette réponse à Marseille, en commençant, après avoir visité les écoles,