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VIE ET ŒUVRE

réussi, comme il résulte de la lettre suivante qu’il m’a envoyée de Novosielki à Moscou, à chasser avec Borissov qui lui a prêté pour ce temps son piqueur Prokofi, son cheval et sa meute. Le 24 octobre, le comte Tolstoï m’a écrit, à Moscou : « Ma petite âme, mon petit oncle Fétinka ! Je vous jure mon petit que je vous aime beaucoup, beaucoup. Et voilà tout. C’est sot et ridicule d’écrire des nouvelles. Écrire des vers… écrivez si vous voulez… mais aimer un brave homme c’est très agréable. Et peut-être est-ce contre ma volonté, contre ma raison, peut-être n’est-ce pas moi, mais une nouvelle qui est en moi et n’est pas encore mûre, qui me fait vous aimer.

« Parfois, cela me semble quelque chose de pareil. On peut faire n’importe quoi et entre le premier et l’autre, tout de même on compose quelque chose. C’est encore heureux que je ne me permette pas d’écrire. Droujinine me demande de lui écrire par amitié, une nouvelle. En vérité, j’en veux écrire une, et de telle sorte qu’après cela il n’y aura rien à dire. Le schah de Perse fume du tabac et moi je t’aime. Voilà comment ! Plaisanterie à part, comment va votre Gaphise ? On peut faire n’importe quoi : mais pour moi c’est la suprême fermeté, la suprême sagesse de se réjouir de la poésie d’un autre, et son propre poème de ne le pas laisser sortir en habits déchirés, mais de le garder chez soi. Parfois, tout d’un coup, on désire tant être un grand homme, et on a tant de dépit de ne l’être pas