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LÉON TOLSTOÏ

à la rapidité de leurs coursiers, en leur abandonnant une selle, étaient arrivés sains et saufs au fort. Tous les cinq ayant voulu arriver au plus vite à Groznaia s’étaient séparés près du mamelon d’Ermolov. Cette manœuvre, hélas ! est trop connue au Caucase. Qui de nous, forcé d’aller au pas sur un excellent cheval, avec l’occasion de l’infanterie, n’est pas parti en avant ? C’est une telle tentation que jeunes et vieux, malgré des ordres très sévères et les punitions des chefs, souvent y succombent, et nos cinq braves garçons avaient agi de même. Quand ils eurent laissé la colonne à cent pas derrière eux ils convinrent que deux d’entre eux marcheraient en éclaireurs, sur la hauteur, et que les autres suivraient la route en bas. Aussitôt que Tolstoï et Sado eurent gravi la montagne ils aperçurent une foule de Tchetchenzes à cheval qui, sortant de la forêt Khan-Kalsk, marchaient droit sur eux. N’ayant pas le temps de descendre pour prévenir ses camarades qui étaient en bas, Tolstoï leur cria que l’ennemi approchait et lui-même et Sado s’élancèrent au galop sur la crête de la montagne vers la forteresse. Les autres, en bas, tout d’abord ne crurent point à cet avertissement, et comme ils ne pouvaient voir sur la montagne ils restèrent quelques minutes immobiles. Quand les Tchetchenzes (dont sept se lancèrent à la poursuite de Tolstoï et de Sado) se montrèrent sur les rochers accourant en bas, Rosen, tournant alors sa monture, galopa sur ses pas, vers la colonne, et eut la chance de la rejoindre. Stcherba-