que vous êtes isolée, quoique je sois séparé de vous, mais si vous croyez à mon amour, cette idée aurait pu faire contrepoids à votre douleur ; pour moi je ne me sentirai isolé nulle part jusqu’à ce que je me sache aimé par vous comme je le suis.
« Je sens cependant que c’est un mauvais sentiment qui me dicte mes paroles, je suis jaloux de votre chagrin[1]. »
Plus loin, dans la même lettre, il raconte un cas intéressant au point de vue des mœurs ainsi qu’au point de vue psychologique.
« Aujourd’hui il m’est arrivé une de ces choses qui m’auraient fait croire en Dieu, si je n’y croyais déjà fermement depuis quelque temps.
« L’été à Starï-Iourt tous les officiers qui y étaient ne faisaient que jouer et assez gros jeu. Comme en vivant au camp il était impossible de ne pas se voir souvent, j’ai très souvent assisté au jeu et malgré les instances qu’on me faisait j’ai tenu bon pendant un mois, mais un beau jour, en plaisantant, j’ai mis un petit enjeu, j’ai perdu, j’ai recommencé, j’ai encore perdu, la chance en était mauvaise, la passion du jeu s’est réveillée et en deux jours j’ai perdu tout ce que j’avais d’argent et celui que Nicolas m’a donné (à peu près deux cent cinquante roubles argent), et par-dessus cela encore cinq cents roubles argent, pour lesquels j’ai donné une lettre de change payable au mois de janvier
- ↑ Lettre en français dans l’original.