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VIE ET ŒUVRE

doctrine religieuse acceptée de confiance et soutenue par la puissance extérieure fond peu à peu comme la neige, sous l’influence de la science et des expériences de la vie contraires à la doctrine religieuse, et très souvent l’homme s’imagine posséder intacte en lui cette doctrine religieuse qui lui est inculquée dès l’enfance alors que, depuis longtemps, il n’y en a plus trace.

« La doctrine religieuse qui m’avait été inculquée dans l’enfance a disparu en moi comme en chacun avec cette seule différence qu’ayant depuis quinze ans commencé à lire des œuvres philosophiques, mon détachement de la doctrine religieuse est devenu conscient très tôt. Depuis l’âge de seize ans j’ai cessé de faire la prière quotidienne et de mon propre motus j’ai cessé d’aller à l’église et de communier. Je n’avais plus la foi en ce qu’on m’avait enseigné dans l’enfance, mais je croyais en quelque chose. En quoi ? Je ne pourrais le dire. Je croyais aussi en Dieu. Ou plutôt je ne niais pas Dieu, mais quel Dieu ? Je l’ignorais. Je ne niais pas aussi le Christ et sa doctrine, mais en quoi consistait cette doctrine je n’aurais su également le dire.

« Maintenant, quand je me rappelle ce temps, je vois clairement que la foi, qui sauf l’instinct animal animait ma vie, ma seule foi sincère en ce temps c’était la foi en la perfection. Mais en quoi consistait la perfection ? Quel était son but ? Je l’ignorais. Je tâchais de perfectionner ma volonté. Je me com-