Page:Biriukov - Léon Tolstoï, vie et oeuvre 1.djvu/233

Cette page a été validée par deux contributeurs.
183
VIE ET ŒUVRE

Ce petit épisode nous montre combien le niveau intellectuel de Léon Nikolaievitch était supérieur à celui de son entourage. Ses Confessions nous révèlent sa conception religieuse à cette époque.

« Je me souviens, dit-il, que quand mon frère aîné Dmitri, encore étudiant, s’adonna tout à coup à la religion avec toute l’ardeur propre à sa nature, et se mit à suivre assidûment tous les offices, à mener une vie chaste et morale, nous tous et même les personnes âgées ne cessions de nous moquer de lui, et l’appelions, je ne sais pourquoi, Noé. Je me souviens que Moussine-Pouschkine, qui était alors recteur de l’Académie de Kazan et qui nous invitait à danser chez lui, le priait de danser aussi, lui disant, pour vaincre son refus, que David dansait devant l’arche. Je sympathisais alors à ces plaisirs des aînés et je tirais de là la conclusion qu’il faut apprendre le catéchisme, aller à l’église, mais qu’il ne faut pas prendre tout cela trop au sérieux. Je me rappelle encore avoir lu Voltaire étant très jeune, et ses moqueries non seulement ne me révoltaient pas, mais m’amusaient.

« Mon éloignement de la foi s’est produit en moi comme il se produisait et se produit maintenant chez les jeunes gens de même instruction. Il me semble que dans la plupart des cas cela arrive ainsi : Les hommes vivent comme vivent tous, et tous vivent en se basant sur des principes qui non seulement n’ont rien de commun avec la doctrine religieuse, mais pour la plupart sont tout à fait contraires. La