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VIE ET ŒUVRE

« — Je me sens ferme, répondis-je.

« — Alors ? maintenant, au trot.

« Et l’écuyer fit claquer sa langue.

« Tchervontchik prit le petit trot. Je commençai à glisser ; mais je ne dis rien et m’efforçai de ne pas tomber sur le côté :

« L’écuyer me félicita :

« — Eh ! cavalier ! voilà qui est bien !

« Ce qui me rendit tout fier. Juste à ce moment, l’écuyer fut accosté par un de ses camarades : il se mit à causer avec lui et cessa de me surveiller. Tout à coup, je me sentis glisser un peu de côté. Je voulais me remettre en selle, mais en vain. J’eus l’intention de crier à l’écuyer d’arrêter, mais, pensant que ce serait honteux pour moi d’agir ainsi, je me tus. L’écuyer ne me voyait pas. Tchervontchik trottait toujours, et moi je me sentais glisser de plus en plus sur le côté. Je regardais l’écuyer espérant qu’il allait venir à mon aide, mais il continuait à causer avec son camarade et, sans me regarder, répétait de temps en temps :

« — Est-il brave, ce cavalier !

« J’étais tout à fait penché et j’avais très peur. Je me croyais perdu. Mais crier, quelle honte ! Une dernière secousse de Tchervontchik me désarçonna et je roulai à terre.

« Alors le cheval s’arrêta. L’écuyer se retournant s’aperçut que je n’étais plus en selle :

« — Tiens, voilà que mon cavalier est tombé ! dit-il.