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LÉON TOLSTOÏ

très gais. Mais voilà que tout à coup, à pas rapides, entre Saint-Thomas, le gouverneur, raide, blond, musclé, de petite taille (décrit dans l’Enfance sous le nom de Saint-Jérôme) ; sans faire attention à ce que faisaient les enfants, le visage pâle, la lèvre inférieure tremblante, il leur dit : « Votre grand-mère est morte. » « Je me rappelle, a raconté Léon Nikolaievitch, qu’on nous mit à tous des costumes neufs en drap noir, bordés de crêpe blanc. C’était saisissant de voir les croquemorts rôder autour de la maison ; ensuite la bière recouverte d’une draperie, le visage sévère de grand-mère, au nez aquilin, en bonnet blanc et un fichu blanc autour du cou, couchée dans la bière posée sur la table… C’était terrible de voir les larmes des tantes et de Pachenka. Mais, en même temps, les vestons neufs garnis de crêpe, la compassion que nous témoignaient tous ceux qui nous entouraient, tout cela me faisait plaisir. Je ne me rappelle plus pourquoi, mais pendant les funérailles on nous installa dans le pavillon… et je me souviens qu’il m’était agréable d’écouter les conversations de femmes quelconques qui, parlant de nous, disaient : « Pauvres orphelins ! Le père vient de mourir et maintenant c’est la grand-mère ! »

Du gouverneur français, Prosper Saint-Thomas, que nous avons mentionné plus haut, Léon Nikolaievitch a conservé un souvenir mélangé de bon et de mauvais.

« Je ne me rappelle plus pourquoi, mais pour