de mon père, et qu’il existait trois billets à ordre aux noms d’Isleniev, Glebov, et Iazikov, que la tutelle a payé ces trois billets à ordre, que les deux premiers ont donné chacun cent mille roubles aux deux fillettes et qu’Iazikov s’est approprié les cent mille roubles qui ne lui appartenaient pas. Mais nous en reparlerons plus tard.
« Dounietchka vécut donc chez nous. C’était une enfant charmante, simple, douce, mais pas intelligente et très pleurnicheuse. Je me souviens que, sachant déjà lire et écrire le français, on me força de lui apprendre les lettres.
« D’abord tout alla bien (nous avions l’un et l’autre cinq ans). Mais peu après, lasse sans doute, elle cessa de nommer exactement la lettre que je lui montrais. J’insistai. Elle pleura, j’en fis autant et quand on vint vers nous, nous ne pûmes prononcer un mot, tellement nous pleurions.
« Je me rappelle aussi qu’une fois, une prune ayant été dérobée de l’assiette, Féodor Ivanovitch ne pouvant découvrir le coupable, d’un air très sérieux, sans nous regarder, nous dit :
« Avoir mangé la prune ce n’est rien ; mais si celui qui l’a mangée a avalé le noyau, il peut en mourir. » Dounietchka, prise de peur, cria qu’elle avait craché le noyau. Je me rappelle encore ses abondantes larmes quand elle et mon frère Mitenka inventèrent un jeu qui consistait à se cracher mutuellement dans la bouche une petite chaînette de cuivre. Elle la souffla si fort, et Mitenka ouvrait une