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piété et la science. Le Père de Monin, dans son Sacrarium celeberrimi D. Laurentii juxta Leodium cœnebii, fixe la date de la mort de Héribrand à l’année 1132 – date que nous avons admise – tandis que les auteurs de la Gallia Christiana et de l’Histoire littéraire de la France la placent quatre années plus tôt, c’est-à-dire en 1128.

Héribrand cultivait, à la dois, la poésie et l’histoire. Ses poésies ne sont pas parvenues jusqu’à nous. Quant à ses travaux historiques, nous possédons une Vie de saint Thierry II ou le Jeune ; Vita sancti Theodorici, abbé de Saint-Hubert en Ardenne, que quelques auteurs lui attribuent. Toutefois, cette vie, qui a été publiée par Mabillon, dans les Acta Sanctorum ordinis sancti Benedicti (t. IX, p. 559 et suiv.), et par les Bollandistes, dans les Acta Sanctorum Augusti (t. IV, p. 848-864), lui est sérieusement contestée par les auteurs de l’Histoire littéraire de la France (xi, p. 78-79). Dans les endroits cités, ces auteurs examinent les arguments allégués pour ou contre les titres d’Héribrand.

E.-H.-J. Reusens.

Paquot, Mémoires, éd. in-fol., II, p. 237. — Hist. litt. de la France, XI, p. 76.

HERIGER (moins correctement Hariger), est le plus ancien historiographe de la Belgique. On ne sait rien de positif sur sa patrie ni sur la date de sa naissance. Vers 955, jeune encore, il entra à l’abbaye de Lobbes, qui était alors un des principaux foyers littéraires de la Belgique, et qui comptait parmi ses illustrations l’évêque Rathère et le chroniqueur Folcuin. Heriger, chargé de la direction de l’école monastique, fut fidèle aux traditions de ses prédécesseurs : il ne laissa pas déchoir les études, et il forma de brillants élèves parmi lesquels on compte Burchard, évêque de Worms et Olbert, abbé de Gembloux. Depuis Francon, l’abbaye relevait au temporel de l’évêché de Liège : Heriger eut ainsi l’occasion d’entrer de bonne heure en relations avec Notger, qui était un chaud protecteur des lettres, et qui attacha le moine de Lobbes à sa personne. Heriger devint l’ami et l’inséparable compagnon du grand évêque, qui l’emmena en Italie, à ce qu’il paraît (985), et qui lui confia d’importants travaux littéraires auxquels lui-même participait dans une large mesure. L’évêque et le moine ont même si bien confondu leurs labeurs, qu’il n’est pas toujours facile de discerner la part de l’un et de l’autre dans les écrits qui nous restent de tous deux. Le rôle d’Heriger ne se borna pas d’ailleurs à ces travaux littéraires ; l’évêque lui confia d’autres missions de confiance, palatina negotia.

En 990, Folcuin étant mort, les moines de Lobbes s’adressèrent à leur chef spirituel, l’évêque de Cambrai, et à leur seigneur temporel, Notger, pour leur demander comme abbé Heriger, dont ils firent à cette occasion un grand éloge. (Voir leurs lettres dans le Gesta epp. Camerac. Pertz, Script. VII, p. 446). Malgré la difficulté que dut avoir Notger à se séparer de son ancien et fidèle collaborateur, la demande fut agréée. Heriger fut consacré abbé de Lobbes le 21 décembre, jour de saint Thomas : depuis cette date, il garda toujours une vénération particulière pour ce saint. Il s’acquitta de ses fonctions avec le zèle et la conscience qu’il apportait à tout : il fit construire l’oratoire de Saint-Benoît, éleva l’autel de Saint-Thomas, et augmenta aussi les ornements sacrés.

Dans les derniers temps, comme il nous l’apprend lui-même, sa vue avait baissé, et il fut obligé de dicter son dernier ouvrage. Il mourut enfin dans une bonne vieillesse le 31 octobre 1007, et fut enterré devant l’autel de Saint-Thommas. À Lobbes, on le regarda comme un saint, et on raconte que des miracles se faisaient sur son tombeau. C’est ce que rapporte une méchante épitaphe du XVIIe siècle :

en l’an mille puis sept
fut cy mis au tombeau
Herigerus discret
qui fit miracles beaux.

Heriger est certainement un des types les plus remarquables du lettré au Xe siècle. Il joignait à la connaissance approfondie de la littérature sacrée celle