captivité que de les prolonger en plus de repos et longue vie »[1]. Nobles paroles, que nous voudrions, — si quelque jour la Belgique, un peu prodigue de statues peut-être pour des célébrités contestables, songeait à en élever une au conquérant de Tunis, au vainqueur de Mühlberg, au prince qui eut la gloire de consommer la réunion des dix-sept provinces et qui plaça toujours les Belges, dans son affection, au-dessus de tous ses autres sujets, — que nous voudrions, disons-nous, voir graver sur le piédestal de cette statue.
Le 6 avril, entre onze heures et minuit, Charles sortit à cheval du palais; les seigneurs d’Andelot et de Rosemberg et quatre serviteurs formaient toute sa suite. Il laissa, en partant, une lettre pour les gentilshommes et les officiers de sa chambre où il leur recommandait le secret sur le voyage qu’il allait entreprendre, sans leur en dire le but; il en donna une autre à l’évêque d’Arras, contenant des instructions relatives à la gestion des affaires publiques pendant son absence; il remit en outre à ce ministre des lettres qu’il adressait au roi des Romains et à la reine douairière de Hongrie, pour les informer de la détermination qu’il avait prise, mais qui ne devaient leur être envoyées que lorsque le bruit de son départ d’Inspruck se serait divulgué[2]. Il comptait parvenir jusque près du lac de Constance par des chemins détournés que Rosemberg connaissait, et de là se diriger vers les Pays-Bas. Il marcha toute la nuit et la matinée du jour suivant. Après s’être reposé quelques heures dans une misérable ferme dépendant du village de Nasserit, à six lieues d’Inspruck, il remonta à cheval et atteignit le village de Bachlbach. Il y était de quelques instants à peine qu’y arriva le maître des postes Christophe de Tassis, venant d’Augsbourg, qu’il avait quitté la veille, et rapportant que, selon le bruit commun, le duc Maurice devait, la nuit suivante, mettre son armée en mouvement vers Landsberg et Füssen. Charles, pour poursuivre sa route, devait passer près de ce dernier endroit; les coureurs ennemis auraient pu aisément le surprendre; sa fatigue était extrême; l’essai qu’il venait de faire l’avait convaincu qu’il s’était abusé sur ses forces : il lui fallut donc, quelque chagrin qu’il en éprouvât, renoncer à son entreprise et retourner à Inspruck. Il rentra dans sa chambre sans qu’on s’en doutât plus qu’on ne s’était aperçu de son départ. Le secret fut si bien gardé que ce voyage resta ignoré du public. Le roi des Romains en eut connaissance seulement quand il vint à Inspruck, et ce fut l’empereur qui le lui apprit; la reine Marie elle-même n’en fut instruite que par une lettre que Charles lui écrivit à la fin du mois de mai. C’est cette lettre qui nous a fourni les détails qu’on vient de lire[3].
Ferdinand, aussitôt après avoir vu le Sr de Rye, avait écrit à l’électeur de Saxe, pour lui proposer une entrevue. Maurice lui répondit qu’il irait le trouver à Lintz le 4 avril[4]. A la cour impériale on supposa qu’il avait fait cette réponse pour gagner du temps, lorsqu’on le vit sommer Augsbourg et se refuser, sous le prétexte que les fils du landgrave n’y voulaient pas entendre, à un armistice que le roi des Romains lui avait également demandé[5] : il avait si souvent manqué à sa parole qu’on n’ajoutait plus foi à ce qu’il promettait[6]. Sur ces entrefaites, il envoya d’Augsbourg à Charles-Quint le colonel Hans Walter de Hiernheim, pour lui annoncer qu’il allait se rendre auprès du duc de Bavière, afin de conférer avec lui sur les ouvertures que le roi lui avait faites; cet envoyé devait aussi dire à l’empereur le sujet des plaintes qu’il avait contre lui, et qui étaient : la
- ↑ Lettre du 4 avril, ci-dessus citée.
- ↑ La lettre au roi est celle du 4 avril citée ci-dessus. Celle de Charles à la reine n’a pas été publiée; elle est aux Archives du royaume.
- ↑ Elle est dans Bucholtz, t. IX, p. 544.
- ↑ Lettre écrite à Côme de Médicis, le 29 mars 1552, par Pier Filippo Pandolfini, son ambassadeur à la cour impériale. (Arch. de Florence.)
- ↑ Lettre de Charles à la reine Marie du 7 avril 1552. (Archives du royaume.)
- ↑ « L’havere mancato molte volte di tante promesse fa che non si gli crede a pieno », écrivait l’ambassadeur Pandolfini le 15 avril. (Arch. de Florence.)