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l’Empire s’étaient plaints déjà, plusieurs reprises, que la diète durât aussi longtemps. Ils avaient statué sur toutes les propositions de l’empereur; en dernier lieu[1] ils avaient voté une aide de soixante mille florins par mois pour la réduction de Magdebourg, en autorisant qu’on prît par anticipation cent mille florins des deniers qui étaient en réserve en vertu des résolutions de la diète précédente; sur la remontrance du roi des Romains[2], que, nonobstant la trève, les Ottomans avaient occupé plusieurs châteaux en Transylvanie, ils avaient décidé que si la guerre éclatait, la moitié de la contribution contre le Turc votée à Spire se payerait au premier jour de l’année suivante, sans que personne en pût être exempt : ils ne voyaient pas dès lors ce qui pouvait empêcher qu’il ne fût mis fin à leurs travaux; leur séjour prolongé à Augsbourg, où tout était d’une cherté excessive, les entraînait dans des dépenses considérables, et leurs affaires souffraient de leur long éloignement de leurs pays et de leurs villes[3]. Charles, condescendant enfin à leur désir, indiqua le 14 février pour la clôture de la diète. La cérémonie eut lieu dans la chapelle de la maison où il habitait[4]. Il était présent, ainsi que le roi son frère, les électeurs, les princes et tous les membres des états. Le cardinal d’Augsbourg commença la lecture du recez, qui fut continuée par le secrétaire de l’Empire[5]. Cette lecture finie, Charles, par l’organe du cardinal, remercia les états des peines qu’ils avaient prises et des soins qu’ils s’étaient donnés pour les affaires de la Germanie; il les exhorta à comparaître au concile que le pape avait convoqué à Trente pour le 1er mai. Le secrétaire de l’électeur de Mayence, au nom de l’assemblée, remercia l’empereur de tant de fatigues qu’il avait souffertes dans l’intérêt de l’Allemagne, et promit que protestants et catholiques se rendraient au concile[6].

Charles avait fait recevoir son fils par les états des Pays-Bas pour leur futur souverain; il voulut aussi lui donner, par anticipation, l’investiture de ceux de ces pays qui relevaient de l’Empire. Son dessein était d’entourer cette cérémonie d’une grande solennité; il espérait que les électeurs, les princes et les autres membres de la diète en rehausseraient l’éclat par leur présence; dans cette vue, des préparatifs furent, par son ordre, commencés sur la Grand’Place d’Augsbourg[7]. Il se vit toutefois déçu de son attente. Comme il entendait se réserver l’administration des Pays-Bas, contrairement à la forme des investitures impériales, et stipuler, relativement au duché de Gueldre, que les femmes y pourraient succéder, en opposition à ce qui était statué dans les anciennes investitures de ce duché, les commis des membres des états absents déclarèrent qu’ils ne pourraient intervenir à un tel acte sans une autorisation spéciale de leurs commettants[8]. Charles alors abandonna l’idée d’une cérémonie publique, et ce fut dans sa demeure qu’il investit son fils[9]. La chose est racontée en ces termes par Vandenesse : « Le 7 mars, étant Sa Majesté à Augsbourg, assise en son siége impérial, accompagnée de plusieurs princes, seigneurs et prélats et ceux de son conseil, vinrent le prince de Gavre, comte d’Egmont, et le comte de Hornes, lesquels étant à genoux devant le

  1. Le 16 décembre.
  2. Il l’avait faite dans les premiers jours de janvier.
  3. Dépêche de Morosini et Badoer du 8 janvier 1551. (Reg. cité, fol. 93)
  4. C’était celle du riche banquier Antoine Fugger.
  5. « Le recès est très-beau et honnorable pour S. M., » écrivit Granvelle, le 21 février, à l’ambassadeur impérial en France.(Papiers d’Etat de Granvelle, t. III, p. 486.)
  6. Dépêche de Morosini et Badoer du 15 février 1551. (Reg. cité, fol. 113 v°.) — Lettre de Marillac à Henri II du 17 février 1551. (Ms. cité, fol. 222 v°.) — Journal de Vandenesse.
  7. Lettres écrites, le 3 mars 1551, à Henri II et au connétable de Montmorency, par l’ambassadeur Marillac. (Manuscrit cité, fol. 242 et 245.)
  8. Lettre de Marillac à Henri II du 24 février 1551. (Manuscrit cité, fol. 224.) — Dépêches de Morosini et Badoer des 19 et 24 février. (Reg. cité, fol. 114 et 115 v°.) — Lettre de l’évêque de Forli à Côme de Médicis du 26 février. (Archives de Florence.)
  9. L’ambassadeur Marillac ne manque pas de se réjouir du desappointement de l’empereur : il écrit au connétable le 3 mars : « La moquerie fut grande d’avoir déjà préparé en public le lieu où se devoit faire l’investiture, pour estre contraint ensuite d’y renoncer. » (Manuscrit cité, fol. 245.)