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pourrait proposer sans faire naître beaucoup de défiances et d’aigreurs[1].

Le 26 juillet Charles fit, à la maison de la ville, l’ouverture de la diète. Cette assemblée était bien différente de celle qui, la dernière fois, avait été réunie dans le même lieu. Des sept électeurs, ceux de Mayence et de Trèves étaient les seuls qui y fussent présents; le comte palatin, dans son entrevue avec l’empereur à Spire, s’était excusé d’y comparaître sur son grand âge[2]; le duc Maurice et le marquis de Brandebourg avaient prévenu le roi des Romains, dès le mois d’avril, qu’ils n’y viendraient pas, si le landgrave n’était mis en liberté[3]. La plupart des princes ecclésiastiques et séculiers y manquaient aussi, et parmi les commis des absents et les députés des villes impériales, beaucoup étaient allés chez eux d’après le bruit répandu que la diète s’ouvrirait seulement vers le milieu du mois d’août ou même dans les premiers jours de septembre[4]. La séance commença par une allocution du cardinal d’Augsbourg. Le secrétaire de l’Empire donna ensuite lecture de la proposition. L’affaire de la religion en était le point essentiel : l’empereur faisait connaître que, conformément au vœu des états, il n’avait cessé de solliciter à Rome la continuation du concile à Trente, qu’il l’avait obtenue du nouveau pape, et qu’il attendait d’heure en heure un nonce apostolique avec lequel cet important objet serait réglé. Il se plaignait que l’intérim et la réforme de l’Église ne fussent pas observés, même par beaucoup de ceux qui les avaient reçus. Il réclamait des mesures énergiques contre les villes qui se montraient obstinées dans leur rébellion aux ordonnances et à l’autorité de l’empereur et de l’Empire. Il parlait de ce qu’il avait fait, en conformité du recez de la dernière diète, pour l’organisation de la chambre impériale et la restitution des biens ecclésiastiques usurpés. Les autres points de la proposition concernaient les monnaies, la répartition des contributions de l’Empire et l’observation des lois politiques que les états avaient votées. Le secrétaire ayant fini sa lecture, il fut annoncé à l’assemblée que l’empereur nommait président de la diète l’archevêque de Mayence. Trois jours après, Charles, avec le roi son frère et le prince Philippe, partit pour la Bavière, afin de s’y livrer au plaisir de la chasse. Il revint à Augsbourg le 8 août[5].

Pendant qu’il était en Bavière, Sebastiano Pighino, archevêque de Siponte, choisi par Jules III pour son nonce à la cour impériale en remplacement de l’êvêque de Fano, était arrivé à Augsbourg[6]; Charles lui donna audience le 11 août[7]. Le nonce, suivant ses instructions[8], l’assura de l’intention du saint-père de faire office de bon pasteur en convoquant le concile à Trente, et de marcher d’accord avec lui, afin que le concile produisît le fruit qu’on devait s’en promettre pour la conservation et l’exaltation de la foi, la confusion des hérétiques, l’avantage de l’empereur et de ses États, sans que l’autorité du saint-siége en reçût d’atteinte : mais il le pria de considérer les égards qu’il fallait avoir pour le roi de France, si l’on voulait qu’il envoyât au concile les prélats de son royaume, sans la présence desquels cette assemblée aurait peu de réputation; la pauvreté des évêques italiens, qui ne leur permettait pas de séjourner longtemps à Trente, et

  1. Il écrivait à la reine le 19 juillet : «Je espère que l’on passera sans tratier : que, à mon advis, seroit le milleur pour beaucoup de respeciz; et, entre les aultres, n’est le moindre, que tiens que sera impossible de obtenir; et à le proposer, pourroit, en beaucop de lieulx et de beaucop de sortes, engendrer aigreurs et deffidances, que de ma part ne vérois volontiers; et tiens que, sy l’on le propose, que troverés que vous ay escript vérité, et qu’il eust esté mieux que on ne le eust jamais proposé. »
       Dans une autre lettre, datée du 13 août, il lui répétait qu’il n’y avait apparence que le projet conçu à Bruxelles pût se réaliser : « Et en le praticant, — ajoutait-il — s’ensuiveroit la haine de nos personnes et maisons, et à la fin ne obtiendrions riens... » (Arch. impér. à Vienne.)
  2. Dépêche des ambassadeurs Morosini et Badoer du 8 juillet 1550. (Registre cité, fol. 4 v°.)
  3. Manuscrits de Wynants.
  4. Lettre de Marillac à Henri II du 29 juillet 1550. (Bibl. nat. à Paris, ms. Saint-Germain 89, fol. 21 v°.)
  5. Journal de Vandenesse.
  6. Le 1er août.
  7. Journal de Vandenesse.
  8. Elles sont dans les Papiers d’Etat de Granvelle, t. III, p. 423.