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six mois, à l’empereur l’entretien de vingt mille hommes de pied et de quatre mille chevaux qui seraient employés contre le roi de France et les Turcs; qu’une capitation dont le produit servirait aussi à faire la guerre aux Turcs serait levée par toute l’Allemagne, sans exemption aucune; que nul sujet de l’Empire ne pourrait aller servir à l’étranger et particulièrement en France; que ceux qui contreviendraient à cette défense seraient punis de peines très-séveres; que, les autres affaires dont les états avaient eu à s’occuper n’ayant pas permis de résoudre la question religieuse, cette question était renvoyée à une dicte qui se tiendrait l’automne ou l’hiver suivant; que, dans l’intervalle, l’empereur chargerait des personnes pieuses, honnêtes et savantes de dresser un projet de réformation; que les princes étaient invités à faire, de leur côté, la même chose; que les différents projets qui seraient formés seraient soumis à la prochaine diète, afin qu’on pût convenir unanimement de la maniére dont on se conduirait jusqu’à l’assemblée d’un concile universel ou d’un concile national; que provisoirement les différentes paix de religion qui avaient été établies seraient observées; que le décret d’Augsbourg et tous autres décrets rendus contre les protestants seraient suspendus; que les juges de la chambre impériale continueraient à remplir leurs fonctions jusqu’à l’expiration du terme fixé pour l’entretien de cette chambre; que, dans la prochaine diète, on délibérerait sur cet entretien pour l’avenir, et que les juges seraient choisis alors sans égard à la religion qu’ils professaient[1].

Charles était impatient d’entrer en campagne. Le recez à peine proclamé, il monte à cheval, laissant au roi des Romains le soin de le signer, et se dirige vers Metz[2]. C’était dans cette ville et aux environs que se trouvaient rassemblées les troupes dont il se proposait de prendre en personne le commandement. Le 6 juillet il se met à leur tête et marche vers Saint-Dizier, que don Ferrante Gonzaga venait d’investir, après s’être emparé de Luxembourg, de Commercy et de Ligny; il comptait sous ses drapeaux treize enseignes de lansquenets, fortes de six mille cinq cents hommes, commandées par le prince d’Orange, René de Chalôn; trois mille sept cents Espagnols; les escadrons du duc Maurice de Saxe, du marquis Albert de Brandebourg, du grand maître de l’ordre Teutonique et de quelques autres princes allemands, les gens de sa garde et de sa maison, qui tous ensemble faisaient deux mille trois cents chevaux environ, avec mille pionniers et huit pièces de canon[3]. Quoiqu’on fût au cœur de l’été, il pleuvait continuellement et les chemins étaient affreux : durant toute cette marche, Charles ne néglige aucune des dispositions qu’on pouvait se promettre d’un prudent et valeureux capitaine, ordonnant lui-même chaque chose et voulant être constamment au milieu de son armée[4]. Il arrive, le 13, au camp devant Saint-Dizier, brisé de fatigue : ce qui ne l’empêche pas d’aller reconnaître la place. Le lendemain un événement fatal le plonge dans la consternation : le prince d’Orange, dont il faisait le plus grand cas, est frappé d’un, coup mortel dans la tranchée, où il venait de descendre. Saint-Dizier était défendu par des fortifications qui le rendaient difficile à emporter; il avait une garnison nombreuse et dont les chefs jouissaient d’une grande réputation militaire; l’armée impériale manquait de pionniers; le temps continuait d’être détestable : aussi le siége avançait peu. Le 23 juillet, Charles fait attaquer les Français, qui occupaient Vitry, d’où ils interceptaient les convois dirigés vers son camp et épiaient l’occasion de jeter du renfort dans la place assiégée; ils essuyent une déroute complète et évacuent Vitry; après avoir perdu plus de quinze cents hommes tués ou pris. Le 9 août, le comte de Sancerre, qui commandait dans Saint-Dizier, perdant l’espoir d’être secouru, capitule; il remet la ville aux impériaux

  1. Sleidan, t. II, p. 228. — Schmidt, t. VII, p. 168.
  2. Lettre de Granvelle à la reine Marie du 18 juin.
  3. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, p. 46.
  4. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, p. 47.