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concerne, Sa Majesté tiendra continuellement le soin qu’un bon prince doit avoir et que méritent les parfaites loyauté, fidélité et continuels grands services des sujets de ces pays. » Il annonce que l’empereur a conclu avec le duc de Clèves une confédération et ligue défensive perpétuelle, qui leur assure, de ce côté, des relations de bon voisinage. De nouveaux subsides devant être prochainement demandés aux états, il fait appel à leur patriotisme et à la fidélité dont ils ont donné tant de preuves à leur souverain, pour les engager à seconder son gouvernement par un puissant effort, qui donne le moyen de ranger une bonne fois les Français à la raison, et de garantir à toujours le pays de leurs entreprises[1]. Charles, se levant, insiste, en quelques paroles, sur les considérations qui ont été exposées par son ministre. Le pensionnaire de Bruxelles, au nom des états, remercie l’empereur de la communication qui vient de leur être faite ; il répète ce que le chancelier de Brabant a déclaré à Diest, qu’ils seront toujours prêts à le servir de leurs corps et de leurs biens.

Le 2 janvier 1544 Charles part pour Spire. A Cologne il apprend que l’archevêque, Herman de Wied, qui avait adopté les principes des novateurs, a récemment proposé à son chapitre d’admettre dans tous les lieux de l’archevêché des prédicateurs luthériens, d’adopter la communion sous les deux espèces, et d’autoriser la célébration des offices en langue allemande, propositions que le chapitre a repoussées avec énergie : il loue hautement le bon esprit dont les membres de ce corps sont animés ; il leur donne l’assurance qu’il ne manquera pas de les soutenir, si eux-mêmes ils ne faillent point à leur devoir[2]. A Creuznach, le 20 janvier, il est joint par le cardinal Farnèse, venant de France, où le pape l’avait envoyé pour exhorter le roi à la paix, et qui était chargé de la même mission auprès de lui. Paul III ne l’avait pas prévenu de son intention de faire cette démarche ; de plus il savait, par les lettres de son ambassadeur à Rome, que Farnèse ne l’aimait point ; que le pape lui-même ne voulait rien faire en sa faveur, se flattant de le contraindre par là à lui céder le Milanais, qui était l’objet de toutes ses convoitises[3] : il accueille froidement le légat, et lui tient un langage assez aigre[4]. Farnèse met en avant quelques propositions d’accommodement : comme elles avaient pour base la conservation par le roi de France de ce qu’il occupait en Piémont, l’empereur lui déclare que, tant que le roi aura un pouce de terre en Italie, on ne pourra faire avec lui de paix sûre et stable. Le légat le prie, si ces propositions ne lui agréent pas, de s’expliquer sur les conditions auxquelles il consentira à traiter : il répond qu’il a offert, par le passé, de fort grands partis et fort avantageux au roi ; que, le roi les ayant refusés, il n’a plus d’offre à faire ; que, quand le roi proposera des moyens d’arrangement, s’ils sont justes, on retrouvera disposé à y entendre. Farnèse s’efforce à justifier les actions du pape : Charles lui dit que la façon dont S. S. s’est conduite dans les affaires publiques, comme dans les affaires particulières qui le touchaient, a été telle qu’il ne sait si S. S. serait un bon « troisième » dans les négociations de la paix, car elle s’est toujours montrée favorable au roi ; il ajoute qu’il connaît S. S. si attachée à son opinion qu’il serait superflu d’en parler ; que si, pour le présent, elle fait ou ne fait pas ce qu’elle doit faire, il fera, lui, dans l’un et dans l’autre cas, ce à quoi il est tenu. Le légat a plusieurs conférences avec Granvelle, sans en pouvoir tirer davantage[5] ; il quitte la cour impériale, le 26 janvier, pour aller rendre compte au roi de France du résultat peu satisfaisant de son voyage. François Ier, qui avait avec tant de présomption recommencé la guerre, recourait

  1. Recueil manuscrit des propositions faites aux états généraux.
  2. Trois années de l’histoire de Charles-Quint, p. 27.
  3. Lettre de Granvelle à la reine Marie du 9 janvier 1544.
  4. Lettre du même à la même du 27 janvier.
  5. Traduction de la lettre de l’empereur à son ambassadeur à Rome, don Juan de Vega, du 25 janvier 1544, dans Lanz, Staatspapiere zur Geschichte des Kaisers Karl V, p. 346. Lanz a placé, par erreur, cette lettre à l’année 1543.