les avoir assurés qu’il avait tout fait pour conserver aux peuples placés sous son sceptre les bienfaits de la paix, et que le roi de France n’avait pas eu de véritable motif de recommencer la guerre, il dit qu’en apprenant, l’année précédente, l’invasion des Pays-Bas, il serait accouru à leur secours, comme il l’avait promis à son dernier départ de ces provinces, si dans le même temps les Français n’avaient attaqué ses royaumes d’Espagne ; qu’aussitôt après les avoir chassés du Roussillon, il avait fait ses dispositions pour passer en Italie et de là en Allemagne, mais que des causes indépendantes de sa volonté avaient retardé ce voyage. Il parla de la réduction du duché de Juliers et de la Gueldre, de sa réception par les états de cette dernière province, du traité qu’il avait conclu avec le duc de Clèves. Il reconnut que, depuis le commencement de la guerre, les états avaient accordé à son gouvernement de bien grands subsides ; il les en remercia ; mais il les invita à considérer aussi que, pour venir les défendre, non-seulement il avait laissé ses enfants, ses royaumes d’Espagne et d’Italie et mis sa personne en plus d’un hasard, mais encore qu’il avait levé, aux dépens de ses autres États, trente mille hommes de pied et quatre mille chevaux. Il leur exposa enfin que, vu la force des troupes françaises qui occupaient le Luxembourg, les levées que le roi faisait de tous côtés, les garnisons qu’il convenait, en ces commencements, d’entretenir dans les places de Gueldre, il n’était point expédient de diminuer l’armée. Il les requérait donc de pourvoir à la solde des gens de guerre du pays, suivant la répartition qui leur serait communiquée, se chargeant, lui, de payer ceux qu’il avait amenés. Le chancelier de Brabant, Engelbert Vanden Daele, répondit au nom de l’assemblée. Les états généraux, dit-il, rendaient grâces à Dieu, qui avait préservé l’empereur en tant de divers, lointains et périlleux voyages ; ils se félicitaient de le revoir, et, surtout après une conquête comme celle qui avait marqué son retour, car elle avait abattu un de leurs principaux ennemis ; ils lui témoignaient leur reconnaissance de ce qu’il n’avait pas hésité à quitter ses autres royaumes et messieurs ses enfants pour venir à leur secours ; ils le suppliaient de prendre de bonne part le petit service qu’ils lui avaient fait pendant son absence, et d’être persuadé qu’il les trouverait toujoursn prêts à le servir, de tout leur pouvoir, comme ses tres-humbles et ses très-obéissants vassaux et sujets. Charles, prenant alors lui-même la parole, entretint l’assemblée de la conduite artificieuse et déloyale du roi de France, qui l’avait attaqué dans tous ses États, alors que ce même prince protestait, par ses lettres, de son intention de maintenir la paix ; il loua beaucoup les mesures que la reine régente avait prises pour la défense du pays, et il réitéra ses remercîments de l’assistance que la nation avait prêtée à sa sœur[1].
Le 25 septembre Charles, se sentant mieux, quitte Diest pour aller rejoindre son armée. Un nouvel accès de goutte le retient à Binche une quinzaine de jours ; dès qu’il en est rétabli, il continue son chemin. Le 19 octobre il arrive au Quesnoy, où il confère sur les opérations militaires avec don Ferrante Gonzaga, le duc d’Arschot et le comte du Rœulx. Le jour suivant il va visiter ses troupes qui avaient investi Landrecies. Bientôt il apprend que François Ier a rassemblé les siennes, qu’il en a pris le commandement et qu’il marche vers lui. Un de ses plus ardents désirs était depuis longtemps de combattre son rival : à peine a-t-il reçu cet avis qu’il prend la résolution de livrer bataille au roi. En vain Granvelle lui fait les remontrances les plus pathétiques pour l’en détourner ; en vain la reine Marie le conjure, au nom de sa maison, de ses sujets, de toute la chrétienté, de ne pas exposer sa personne aux risques de la guerre. Il ne se rend pas plus aux prières de sa sœur qu’aux raisons de son premier ministre ; l’occasion qu’il avait tant souhaitée venait s’offrir à lui, il ne veut pas la laisser échapper. Le 28 octobre il se confesse et communie. Le 2 novembre il met son armée en mou-
- ↑ Recueil manuscrit des propositions faites aux états généraux. — Journal de Vandenesse.