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Charles ayant, le 10 mai, renouvelé la loi de Gand, quitte cette ville, deux jours après, avec la reine Marie et le roi des Romains, qui reprend le chemin de l’Allemagne. Il visite Anvers, Malines, Louvain; passe une quinzaine de jours à Bruxelles; retourne à Gand afin de s’assurer de l’état d’avancement des travaux entrepris pour la construction du château; va de là à Bruges, d’où il se dirige vers la Zélande et la Hollande, toujours en compagnie de la reine, et revient le 31 août à Bruxelles, pour s’occuper des affaires du gouvernement. Le 4 octobre il assemble, dans la grande salle de son palais, en sa présence et celle de la reine, les états généraux des Pays-Bas, que le conseiller d’état Schore harangue en son nom. Ce ministre commence par rappeler succinctement les actions de l’empereur depuis son départ des Pays-Bas en 1531; il déduit ensuite les motifs qui l’y ont ramené. C’est d’abord le désir de remercier ses bons et loyaux vassaux et sujets de toutes les preuves de dévouement qu’ils lui ont données; c’est, en second lieu, l’affaire de Gand : « S. M. — dit l’orateur — est venue par deçà pour remédier à aucunes indues violences et désobéissances, afin que, sous ombre d’icelles, ses autres bons et loyaux vassaux et sujets ne tombassent en inconvénient : à quoi S. M. avec grande clémence a mis l’ordre que chacun sait, non pour innover quelque chose quant aux autres[1], mais seulement pour éviter l’inconvénient qui autrement y auroit pu advenir, en tenant et ayant seul regard à l’assurance et tranquillité de la généralité de ses pays de par deçà, et comme il a connu et trouvé qu’il était plus que nécessaire et requis après tant d’autres exemples passés. » Enfin l’empereur a voulu prendre connaissance par lui-même de ce qui s’est fait depuis 1531, et pourvoir à la bonne administration des affaires publiques pour l’avenir. Dans cette vue, il a promulgué contre les sectes réprouvées de l’Église une nouvelle ordonnance dont communication va être donnée aux états; il en a fait rédiger une autre, qui leur sera communiquée également, sur les banqueroutes et les banqueroutiers, les monopoles, l’usure, les juges ecclésiastiques, les notaires, les avocats, les mariages clandestins, l’élection des gens de loi; frappé de la multitude de délits qui se commettent par la négligence des officiers de justice et leur facilité à composer avec les délinquants, il a consulté les conseils provinciaux sur les mesures à prendre pour remédier à ce mal; il s’est, en outre, occupé des monnaies ainsi que des moyens d’abréger la durée des procès et de diminuer les dépenses supportées par les parties. L’orateur annonce que, pour déférer à la prière de tous les états de la Germanie, l’empereur a résolu de convoquer une diète et de s’y trouver en personne; qu’il reviendra aux Pays-Bas le plus tôt et y demeurera le plus de temps possible; qu’il a continué la reine sa sœur dans la charge du gouvernement dont elle s’est si bien acquittée jusque-là. Il termine en faisant appel a l’union des états entre eux, et en les assurant de l’affection de l’empereur. Le docteur Schore ayant achevé, un secrétaire donne lecture des deux ordonnances mentionnées dans son discours[2]. Le pensionnaire de Bruxel-

  1. Il y a, aux Archives du royaume, deux minutes du discours du conseiller Schore, toutes deux de sa main. Dans la première, le passage que nous donnons en italique était ainsi conçu ; « non pour assujétir ou asservir ses sujets plus qu’ils n’ont esté du passé, ce que S. M. ne pensit oncques ne voudroit pour rien faire. » Ce passage avait été reproduit dans la seconde minute; mais Schore le traça, pour y substituer celui dont il fut donné lecture aux états. Il est à croire que l’empereur lui-même ne fut pas étranger à ce changement.
  2. L’ordonnance contre les hérésies était datée du 27 septembre 1540; celle qui concernait les banqueroutes, les monopoles, etc., portait la date du 4 octobre. La première était principalement dirigée contre la publication et la vente de livres hérétiques; des peines terribles étaient établies contre les contrevenants : les hommes étaient exécutés par l’épée, les femmes par la fosse, et les uns et les autres par le feu, s’ils ne rétractaient pas leurs erreurs.