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Bretex raconte qu’il commença son livre à Salm, en Alsace, dans le château du comte Henri de Blamont, le huitième jour d’août 1285. La scène se passe à Chauvency-le-Château, au manoir de Louis de Looz, comte de Chiny. Le poëte s’étend avec complaisance sur les beaux coups qui signalèrent la joute de Chauvency, portés par de nobles chevaliers et applaudis par de gentilless dames. Le poëme fournit de précieux enseignements sur les relations d’hospitalité qu’entretenaient les nobles du XIIIe siècle; on y trouve des indications sur les chansons en faveur à cette époque; enfin les jeux et les plaisirs y sont dépeints avec grâce et naïveté. Il faut citer, à ce propos, le Tour du chapelet, joué par la belle comtesse de Luxembourg, c’est une petite ballade détachée du poëme. — Cet ouvrage est, comme le dit le poëte, une œuvre de galanterie, un chant de guerre et de joie :

D’amors d’armes et de joie
Est ma matière, et de tel gent
Qui sont et bon, et bel, et gent,
Mignot, jolif et envoisé,
Et ès maint loing païs prisié.

Le poëme de Bretex est le complément de l’Ordene de chevalerie, écrit par Hue de Tabarié, châtelain de Saint-Omer, au commencement du XIIe siècle; il forme un ensemble avec cet ouvrage et avec Le pas d’armes de la Bergère, maintenu au tournoi de Tarascon. Les tournois de Chauvency servirent au Père Ménestrier, qui en fit une longue étude et en inséra de nombreuses citations dans son Origine des ornements et des armoiries.

M. Delmotte, de Mons, fit une publication complète des Tournois de Chauvency; il en avait trouvé une copie parmi les manuscrits de la bibliothèque confiée à ses soins. MM. Serrure et Voisin s’occupèrent aussi des mêmes Tournois dans les préliminaires du livre de Baudoyin; ils les désignent comme appartenant à la littérature de l’ancienne Belgique. Enfin il est fait mention du poëme de Jacques Bretex dans l’Histoire littéraire de la France due à M. Victor Leclerc. L’œuvre la plus curieuse de notre trouvère est la collection de toutes les chansons de son siècle couronnées par les puys d’amour de nos provinces et du Nord de la France (1285). Ces pièces sont divisées en six chapitres que l’auteur nomme Abécélaires. Cette division fait combattre les différentes espèces de vers admises au concours. Le premier chapitre comprend les pièces nommées les Grans chants, ce qui signifie : Chansons d’amour, les principales suivant le goût de l’époque; il y en a soixante-treize, parmi lesquelles se sont glissés quelques cantiques. La deuxième division est celle des Estampies : ce sont des descriptions spéciales d’un événement, d’un lieu, d’une personne; il y en a dix-huit. La troisième division comprend les Jeux-partis, au nombre de trente-six. La quatrième est celle des Pastorelles; on en compte cinquante-sept. La cinquième est consacrée aux Ballettes ou balades, elles atteignent le chiffre de cent quatre-vingt-huit. Enfin la sixième division contient vingt-deux Sottes chansons contre l’amour, mises à dessein à la suite des autres. Ce récueil se trouve en Angleterre. L’abbé de la Rue, qui en rend compte dans ses Essais historiques sur les bardes, les jongleurs et les trouvères (Caen, 1834), en prit connaissance quand il se trouvait encore dans la bibliothèque de sir Francis Douce.

Bon Albéric de Crombrugghe.

*BREUCHÉ DE LA CROIX (Edmond), poëte et orateur sacré du XVIIe siècle. Le commencement et la fin de la vie de cet homme de talent sont restés dans l’obscurité : on ignore encore les dates de sa naissance et de sa mort. Il naquit probablement en France, au commencement du XVIIe siècle. On a prétendu qu’il était né à Liége, mais ce qu’il dit de lui-même dans ses écrits ne permet pas d’ajouter foi à cette assertion.

Issu d’une famille noble, Breuché fut destiné à l’état ecclésiastique et alla achever ses études en Italie, où il fit un long séjour. À son rétour en France, ses talents, son éloquence surtout, le firent remarquer et lui valurent successivement les fonctions de conservateur des priviléges de l’ordre de Malte, protonotaire apostolique, aumônier et prédicateur de Madame, duchesse d’Orléans. Son séjour à la cour de France ne devait cependant