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trait sans doute exclusivement à ses relations avec l’empire.

Cependant la possession de la Bretagne ne suffit pas à assouvir l’ambition du nouvel empereur; il chercha à étendre sa domination sur une partie de la Gaule. Dans ce but, il s’empara de Boulogne, et y envoya une partie de sa flotte, qui de là dominait la Manche et commandait les embouchures de la Seine et du Rhin. L’occupation d’une telle position devenait un danger sérieux pour l’empire, menacé d’ailleurs sur d’autres points encore. A la suite d’une entrevue qu’ils eurent à Milan, Dioclétien et Maximien s’adjoiguirent deux nouveaux Césars, Constance Chlore et Galère Maximien. Constance, qui eut en partage toute la Gaule au delà des Alpes, comprit que l’affaire la plus urgente pour lui était de reprendre Boulogne. Il vint donc assiéger cette place et ayant construit une vaste circonvallation, embrassant à la fois la ville et le port, il amena la garnison et la flotte à se rendre, avant même qu’il eût commencé l’attaque. Avec les vaisseaux pris sur l’ennemi et ceux qu’il avait pu ramasser dans les ports de la Gaule, Constance tenta, selon toute probabilité, une expédition contre la Bretagne, qui n’eut pas plus de succès que celle de son prédécesseur. Les empereurs, comprenant que pour réussir ils avaient besoin d’une force navale beaucoup plus considérable, jugèrent qu’il était d’une bonne politique de gagner du temps en traitant avec le pirate (comme on l’appelait) et en le reconnaissant comme souverain indépendant de la Bretagne. Pour perpétuer le souvenir de cet événement, l’empereur breton fit frapper entre autres une médaille où l’on voit d’un côté son buste radié, accolé à ceux de Dioclétien et de Maximien avec la légende : CARAVSIVS ET FRATRES SUI; et au revers la Paix tenant une branche d’olivier et un sceptre avec ces mots : PAX AVGGG.

Carause ne jouit pas longtemps du repos que lui laissait cette paix, qui en réalité n’était qu’une trève; Alléctus, l’un de ses lieutenants et son premier ministre, voulant prévenir la mort que lui avaient méritée ses crimes, assassina son maître et se fit proclamer empereur à sa place. Ainsi périt Carause, en 293, après un règne de sept ans.

Carause fut sans contredit un homme extraordinaire, mais ses vices égalaient ses grandes qualités. Son ambition suprême paraît avoir été de s’asseoir sur le trône des Césars, occupé alors par deux soldats de fortune comme lui, sans que jamais l’idée lui soit venue d’affranchir son pays de la domination étrangère. Son avarice connue ne permet pas de supposer qu’il ait allégé la lourde charge des impôts que le régime romain faisait peser sur les Bretons. S’il est vrai qu’après la mort d’Allectus ceux-ci rentrèrent avec plaisir sous la domination de leurs anciens maîtres, il faut en conclure qu’ils avaient supporté impatiemment le joug de leurs deux empereurs nationaux.

J. Roulez.

Aurelius Victor, De Cæsaribus, cap. 39. Epitome, c. 40. — Eutropius, Historiar. rom. Breviarium, lib. IX, capp. 21. 22. — Orosius, Historiar., lib. VII, c. 25. — Mamertinus, Panegyrie. Maximiano Herc. dictus., capp. 11. 12. — Genethliacus Maxim., c. 19. — Emmenius, Panegyr. Constantio Caesari, capp. 6. 7. 12. Panegyr. Constantino, c. 5. — Monumenta historica Britannica, in-fol. — H. Cohen, Description histor. des monnaies frappées sous l’emp. rom., T. V. pp. 501 à 539. — Bulletins de l' Académie de Belgique, 2e série, tome XXIII. n° 3

CARDON (Antoine-Alexandre-Joseph), dit le vieux, peintre, graveur à l’eau forte et au burin, né à Bruxelles le 7 décembre 1739, mort dans cette ville le 10 septembre 1822. Dès son jeune âge, il étudia les éléments de l’art plastique, et eut ensuite pour premier maître Hyacinthe de la Pegna, peintre de l’impératrice Marie-Thérèse, à Bruxelles. Il fit avec lui le voyage de Vienne, où ils séjournèrent tout un an. Quelques ouvrages, qui annonçaient un talent véritable, attirèrent sur Cardon l’attention du comte de Cobentzl, ministre d’Autriche dans les Pays-Bas, et, grâce à ce protecteur des arts, il obtint le titre de pensionnaire impérial; il put ainsi visiter l’Italie, avec fruit et bien-être. Il demeura pendant trois années à Rome, se perfectionnant dans la pratique picturale et s’essayant à graver, tant à l’eau-forte qu’au burin. Il se rendit alors à Naples, s’y livra à la gravure avec une prédilec-