Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 2.djvu/435

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

celui-ci avec l’empereur d’Allemagne. L’année suivante, il se rendit en Angleterre, avec mission d’entraîner le roi Édouard dans une ligue contre la France. Le 2 mars 1476, il commanda l’avant-garde à la funeste journée de Granson; au mois de juin suivant, le duc lui confia l’aile gauche lors de la bataille qui fut livrée près de Morat; enfin le 5 janvier 1477, il partagea avec lui le commandement du centre de bataille dans les plaines de Nanci, et fut au nombre des prisonniers, faits en ce jour, par le duc René de Lorraine. Ici se termine la longue et glorieuse carrière militaire d’Antoine de Bourgogne. Le duc de Lorraine ayant cédé son prisonnier au roi de France, le grand bâtard s’engagea dans le parti de ce prince et le 15 août 1478 il prêta, sur un fragment de la vraie croix, le serment de fidélité. Devenu l’un des conseillers les plus écoutés de son souverain, il joua un rôle important dans l’histoire politique de cette époque. Par lettres du 20 août 1478, le roi de France l’investit des seigneuries de Grand-Pré, Château-Thierry, Passavant et Châtillon-sur-Marne; il le créa plus tard chevalier de son ordre de Saint-Michel.

Sa conduite en cette circonstance a été jugée très-sévèrement par quelques historiens; on peut cependant faire valoir diverses excuses en sa faveur, et l’on a vu, plus tard, l’archiduc Maximilien lui-même prendre chaudement la défense du bâtard, devant un chapitre de l’ordre de la Toison d’or, où sa conduite était attaquée. Plancher, dans son Histoire générale de Bourgogne, nous dit qu’Antoine n’entra au service de la France qu’après que le mariage de la princesse Marie fut arrêté avec Maximilien d’Autriche. La couronne ducale étant alors passée dans une maison étrangère, le grand bâtard, descendant de la maison royale de France, se soumit au roi Louis XI son parent. En 1482, il intervint, au nom de ce souverain, dans la conclusion du traité d’Arras.

Il se rendit plusieurs fois en Flandre et servit de médiateur entre le roi des Romains et les communes flamandes. Despars, dans ses chroniques, raconte la brillante réception qui lui fut faite à Bruges, le 19 mai 1484. Le 4 juillet de la même année, il fut encore prié par les états de Flandre réunis à Termonde d’employer ses bons offices auprès du roi des Romains et de lui porter des propositions d’arrangement. — En 1487, enfin, Maximilien le chargea de négocier la paix avec les Gantois insurgés. — Le roi de France, Charles VIII, le légitima par lettres patentes, données à Melun en janvier 1485. — Meyer, dans ses Annales Flandriæ, rapporte qu’au mois de mai 1475 le pape Sixte IV l’avait également légitimé. — Si le fait est exact, il serait difficile d’expliquer pourquoi le roi de France lui a accordé des lettres de légitimation dix ans plus tard. — Antoine de Bourgogne fut un protecteur éclairé des lettres et des arts : sa bibliothèque était une des plus riches de l’époque. On conserve à la bibliothèque dite de Bourgogne, à Bruxelles, plusieurs manuscrits fort remarquables qui lui ont appartenu. On les reconnaît à la devise « Nul ne s’y frotte » écrite à la main; ils portent d’ailleurs sa signature. Le magnifique manuscrit de Froissart, auquel les habitants de Breslau attachent tant de prix, provient aussi de sa librairie. Georges Chastellain, dans ses chroniques, parle de lui en ces termes : « un très-gentil bel chevalier entre mille, en qui honneur et nature avoient mis des dons beaucoup et de hautes apparences en fait de chevalerie et dont desjà on en a vu les espreuves. »

Il mourut à l’âge de quatre-vingt-trois ans et fut enterré à Tournan en Brie. — L’auteur de l’Histoire chronologique et généalogique de la maison royale de France (Amsterdam, 1713) nous apprend qu’il eut trois filles. Son fils, Philippe, seigneur de Beveren, fut amiral de Flandre, gouverneur d’Artois et plus tard gouverneur de Flandre.

Bon Albéric de Crombrugghe.

BOURGOGNE (Antoine DE), né à Bruges et mort dans cette ville, le 29 mai 1657. Issu de la branche bâtarde des ducs de Bourgogne, Antoine fit ses humanités chez les Jésuites à Bruges, et y reçut le grade