Page:Biographie nationale de Belgique - Tome 1.djvu/99

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sireux, pour consommer la ruine de Barnevelt et de son parti, de disposer d’une majorité suffisante dans les états de Hollande. Ayant convoqué la noblesse dans son hôtel, il appuya la requête des seigneurs de Sommelsdyck et de Heemskerk. L’assemblée délibéra le lendemain. Huit membres opinèrent pour l’admission du seigneur de Sommelsdyck ; les six autres votèrent contre. La réception de Hartaing fut repoussée par sept voix contre sept. Maurice, très-mécontent, exigea immédiatement une seconde délibération ; elle n’eut pas un meilleur résultat. L’assemblée fut convoquée une troisième fois pour le lendemain, 19 janvier 1619. Comme l’opposition faiblissait, Maurice, sans perdre de temps, introduisit François d’Aerssen et Daniel de Hartaing et les fit inscrire au rang des chevaliers, avec cette réserve « que leur admission ne pourrait tirer à conséquence ni préjudicier aux droits de la noblesse et du pays. » Sommelsdyck et Heemskerk prêtèrent serment le 22 janvier. Alors les états généraux, pour contenter Maurice, s’empressèrent d’inscrire aussi François d’Aerssen, membre de l’ordre de la noblesse des états de Hollande, parmi les juges de Barnevelt. Mais la famille de cet infortuné le récusa. La femme et les enfants de Barnevelt présentèrent une requête dans laquelle ils reprochaient à François d’Aerssen d’avoir donné des preuves d’inimitié contre l’accusé, en ne cessant, depuis quelques années, de répandre des libelles contre lui. D’Aerssen s’abstint de siéger. On lui attribua néanmoins la rédaction du jugement qui condamna Barnevelt à être décapité. « ― S’il ne meurt point, aurait-il dit à ceux qui recommandaient la clémence, tout notre projet est à rien, et nos jours courront grand danger. Il faut donc qu’il meure. » — Barnevelt mourut sur un échafaud (13 mai 1619), malgré les intercessions des ambassadeurs de France. Les états généraux, après avoir fait imprimer la sentence prononcée contre Barnevelt, l’envoyèrent à Louis XIII. Elle était accompagnée d’une lettre qui contenait des plaintes amères contre l’ambassadeur du Maurier ; on priait même le roi de lui défendre de soutenir et nourrir des factions dans la république. Cette lettre, encore attribuée à François d’Aerssen, choqua vivement la fierté française. En 1621, une ambassade ayant été envoyée à Paris pour le renouvellement de l’alliance entre les deux nations, le roi ne se borna point à se plaindre de la mort de Barnevelt ; il protesta contre le libelle qu’on attribuait à François d’Aerssen ; il traita celui-ci d’imposteur et demanda qu’il fût puni. Mais les ambassadeurs alléguèrent le silence de leurs instructions.

Le ressentiment de la cour de France s’était déjà manifesté antérieurement. D’Aerssen, « après avoir un peu marchandé sur l’appointement, » avait, en 1620, accepté la commission d’ambassadeur extraordinaire des états généraux à Venise, pour ratifier le traité conclu en dernier lieu entre les deux républiques. Il devait s’arrêter auprès de plusieurs princes d’Allemagne, afin de les bien disposer en faveur du roi de Bohême (l’électeur palatin Frédéric V). Or, Louis XIII défendit aux ambassadeurs, qu’il avait lui-même envoyés au delà du Rhin pour les affaires de Bohême, il leur défendit de recevoir les visites de M. D’Aerssen. L’ordre portait « que ce n’était pas à cause des états des Provinces-Unies, avec lesquels le roi voulait continuer de vivre en bonne intelligence, mais à cause de M. D’Aerssen en particulier, pour en avoir mal usé touchant le service et la dignité de Sa Majesté. » D’Aerssen partit de la Haye le 15 avril 1620. Pendant qu’il était absent, on répandit de mauvais discours sur son compte, et son nom fut mêlé à un incident tragique. Un certain présent de vaisselle plate avait été porté dans sa maison, de la part de l’électeur de Brandebourg, en même temps qu’on arrêtait l’agent de ce prince, un nommé Stick. Celui-ci et un autre furent décapités à Amsterdam, le 29 juillet, « pour avoir battu de la monnaie. » En rendant compte de cet événement à sa cour, l’ambassadeur anglais ajoutait : « Les noms D’Aerssen et de quelques autres personnes considérables ayant été mis en jeu ont hâté l’exécution de Stick, pour montrer qu’ils n’étaient ni com-