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devint évêque de Cambrai en 976 ou en 977. Adalbéron avait fait à la célèbre école de Gorze de tels progrès, que Folcuin, abbé de Lobbes, son contemporain, le regardait comme un des hommes les plus savants de la Belgique[1].

Adalric, archevêque de Reims étant mort le 6 novembre 969, le roi Lothaire jeta aussitôt les yeux sur Adalbéron pour le placer sur ce siége et le faire élire par le clergé et par le peuple. Son sacre eut lieu à Rome, où il se trouvait en 970. L’église de Reims avait alors besoin d’un pasteur aussi habile que zélé. Les suites funestes de l’intrusion de Hugues lui avaient causé des dommages considérables, tant sous le rapport spirituel que temporel. Aux anciens malheurs succédèrent de nouvelles tribulations. Quelques seigneurs, abusant de leur puissance, cherchèrent à inquiéter le nouvel archevêque, qui se trouva quelquefois contraint de repousser la force par la force, afin de soutenir la justice de sa cause contre l’oppression. Les différends élevés entre les souverains lui attirèrent d’autres difficultés et le mirent plus d’une fois, comme il le dit lui-même, entre le marteau et l’enclume : inter malleum, et incudem.

Au milieu de ces circonstances si difficiles, Adalbéron s’arma de prudence, de zèle et de courage. Il trouva le moyen de revendiquer les biens enlevés à son église, d’en augmenter les revenus, de rétablir parmi les chanoines de sa cathédrale et dans le clergé une discipline sévère et de rendre à tout le diocèse son ancien lustre. Il avait un talent particulier pour l’enseignement, et ses instructions réunies à ses exemples produisirent partout des fruits de bénédiction. Il savait animer les faibles à la pratique des vertus et obliger les méchants à rentrer dans le devoir.

Pour réformer son diocèse, il tint plusieurs conciles à Reims et, plus souvent encore à Mont-Sainte-Marie, entre Basoches et Fîmes. Malheureusement les actes de ces assemblées ne nous sont pas connus. Dans un de ces conciles, en 972, il fit confirmer le privilége qu’il avait obtenu du saint siége, en faveur de l’abbaye de Mouzon, dont il fut le restaurateur. Il y mit des moines à la place des clercs et y transféra le corps de saint Arnoul, martyr. Il introduisit, en 974, la même réforme dans l’abbaye de Saint-Thierri et il leva de terre le corps du saint dont cette maison porte le nom. En 975, il dédia l’église de l’abbaye de Saint-Pierre, à Gand, de même que celle du monastère de Saint-Remi, à Reims, dont il fut, pendant quelque temps abbé, et auquel il réunit celui de Saint-Timothée. En 976 ou 977, il célébra la cérémonie du sacre de son ancien ami Rothard, nommé évêque de Cambrai.

Les écoles de Reims étaient, pendant les temps de troubles, extrêmement déchues de leur ancienne splendeur, Adalbéron en fit un objet particulier de sa sollicitude, et en confia la direction au célèbre Gerbert, qui avait abandonné son abbaye à Bobio et qui s’était retiré à Reims. Bientôt elles acquirent une immense réputation, et parmi les élèves qui illustrèrent l’école métropolitaine de Reims, on compta le prince Robert, depuis roi de France, Fulbert qui devint évêque de Chartres, et Gérard de Florenne que l’empereur saint Henri prit pour son chapelain et qui fut nommé ensuite évêque d’Arras et de Cambrai.

Adalbéron, malgré ses nombreuses occupations pastorales, prit une part active aux travaux de Gerbert pour soutenir les bonnes études. Il ne se contentait pas de faire copier des anciens ouvrages, mais, à différentes reprises, il envoya Gerbert en Italie et dans d’autres pays pour y rassembler des manuscrits dont on manquait à Reims. On y forma ainsi une des plus riches bibliothèques de cette époque. Au reste, l’école métropolitaine de Reims était non moins renommée pour la vertu que pour la science. C’est l’idée que Gerbert, qui devint pape sous le nom de Silvestre II, nous en donne lorsque, en parlant du séjour qu’il fit auprès d’Adalbéron, il

  1. Illarum partium eruditissimo.. Adalberone. Folcuinus, de Abbatibus Lobbiensibus, cap. VII.