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la force. Ses partisans envahirent la cathédrale. Mais comme l’élu voulait, selon la coutume, sonner la cloche en signe de prise de possession, la corde vint à se détacher. On crut que le ciel condamnait par ce prodige les prétentions d’Alexandre. À une nouvelle élection, ordonnée par le métropolitain de Cologne, ce fut le prévôt Frédéric qui fut choisi. Alexandre essaya de résister. Assiégé dans Huy par l’évêque Frédéric et son frère le comte de Namur, il fut contraint à la soumission, quoiqu’il eût été secouru par le duc de Brabant et le comte de Montaigu. En 1121, Frédéric mourut empoisonné. On accusa de ce crime les partisans de l’archidiacre. Ce ne fut pas lui cependant qui en profita : en dépit de ses efforts, c’est sur l’évêque de Metz, Albéron, que se portèrent les suffrages. Enfin quand ce dernier mourut (1128), Alexandre réussit à saisir cette crosse, objet de tant de combats. Chez lui l’évêque ne démentit pas les propensions belliqueuses dont l’archidiacre avait donné des preuves si regrettables. Une guerre ayant éclaté entre le comte de Louvain, Godefroid le Barbu, et le comte de Limbourg, Waleran, il se rangea du côté de ce dernier. Provoqué par des incursions de l’ennemi sur son propre territoire, il mit le siége devant Duras, avec le comte de Limbourg. Mais le comte de Louvain et son allié le comte de Flandre, Thierri d’Alsace, le forcèrent à lever le siége. Le résultat de leur première rencontre ayant cependant été indécis, Godefroid envoya à l’évêque un défi que Waleran accepta au nom du chevaleresque prélat. C’est dans les plaines de Wildre, à une lieue de Saint-Trond, que le cartel se vida. Au début, l’armée épiscopale commençait à tourner les talons ; mais grâce aux efforts des Hutois, animés par le valeureux comte de Looz, les Brabançons furent mis en fuite. Il y eut des deux côtés environ neuf cents morts. Cette victoire fut signalée par la prise du grand étendard de Godefroid : c’était l’ouvrage de la reine d’Angleterre ; ses mains habiles en avaient tracé les magnifiques broderies. Consacré à saint Lambert par les Liégeois triomphants, il orna, pendant plusieurs siècles, les processions de la ville épiscopale. Cette dernière fut témoin encore du sacre de l’empereur Lothaire II, couronné avec sa femme, par Alexandre Ier, en présence de saint Bernard et de trente-deux prélats, tant abbés qu’évêques. Le pape Innocent II honora aussi de sa visite le vainqueur de Wildre. Quelque temps après, il devait le sommer de comparaître devant lui, pour répondre aux accusations de simonie que ses ennemis (et l’on comprend qu’il n’en pouvait manquer) avaient produites à sa charge. Assigné trois fois en vain, l’évêque de Liége finit par être déposé au concile de Pise. Les reproches que l’histoire semble en droit de lui adresser n’empêchent pas Gilles d’Orval de louer sa prudence, son éloquence, son humilité, sa dévotion, sa charité. Il mourut de chagrin, dit-on, au monastère de Saint-Gilles, où il avait cherché un refuge.

F. Hennebert.

Dewez, Histoire de Liége. — Gilles d’Orval, apud Chapeauville.

ALEXANDRE II, soixante et unième évêque de Liége, mort le 5 août 1167. C’était le fils d’un seigneur des environs de Trèves. Quand on l’élut évêque, il était déjà prévôt de Saint-Lambert. C’est lui qui, en 1165, la deuxième année de son épiscopat, exhuma, à Aix-la-Chapelle, les restes mortels de Charlemagne[1], et leur fit quitter pour une châsse d’argent la place où ils reposaient depuis trois cent cinquante-deux ans. Ce déplacement eut lieu à l’occasion de la canonisation du grand Empereur. L’archevêque de Cologne, Renaud, y assista, ainsi que l’empereur Frédéric Ier, avec un grand nombre de prélats. L’histoire montre ces mêmes personnages engagés ensuite dans une entreprise toute différente. Alexandre de Liége et Renaud de Cologne suivirent Frédéric Ier de Hohenstauffen dans sa troisième expédition d’Italie. Ils prirent part ensemble à un combat livré sous les murs de Rome aux habitants de la ville éternelle, qui avaient tenté une sortie. L’Empereur victorieux entra dans la cité papale, où il se fit couronner par l’antipape Pascal.

  1. Voyez Arendt, Bulletins de l’Académie royale de Belgique, 2e série, t. XII, 1861.