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l’honneur de sainte Aldegonde, et l’autre dans le cloître de Saint-Pierre, sous l’invocation de saint Clément et de saint Trond[1]. Ce fut lui qui introduisit dans le diocèse de Liége, par un décret synodal, le culte solennel de sainte Marie-Magdeleine, à l’occasion des miracles opérés par l’intercession de cette sainte, dans une chapelle qu’un prêtre, nommé Bolan, avait fait bâtir, à Caster, sur une hauteur près de Maestricht[2].

En 1096, l’évêque Otbert fit, au nom de son Église, l’acquisition du château de Bouillon, que Godefroid lui vendit, à son départ pour la terre sainte, en se réservant la faculté de rachat pour lui et trois de ses héritiers consécutifs. Ce rachat n’ayant pas eu lieu dans le délai fixé, le château continua dès lors à appartenir en pleine propriété à l’évêque de Liége, qui devint, en vertu de cette acquisition, vassal de l’archevêque de Reims, car Bouillon était un fief de cette Église. Il survint, à ce sujet, en 1127, un différend entre Albéron et Renaud de Martigny, archevêque de Reims. La même année, par un acte signé à Reims[3], l’archevêque céda à Albéron et à ses successeurs la directe de son Église sur la seigneurie de Bouillon, mais en s’en réservant à lui-même et à ceux qui lui succéderaient dans l’Église de Reims la haute justice et le service militaire ; en même temps il reçut l’hommage d’Albéron[4]. Ces conditions ne parurent pas entièrement satisfaisantes aux Liégeois. Un de leurs historiens rapporte même qu’on trouva qu’Albéron, vers la fin de ses jours, ne répondit guère à l’estime qu’il avait fait naître et aux espérances qu’on avait fondées sur lui[5]. Le seul reproche qu’il mérite peut-être, c’est que, parvenu à un grand âge et affaibli par les travaux apostoliques, il ne défendit pas avec assez d’énergie, dans son différend avec l’archevêque de Reims, la liberté du duché de Bouillon, et qu’ensuite, il se montra trop faible à l’égard de Renaud, comte de Bar, descendant des anciens comtes ou ducs de Bouillon, qui tenait pour nulle la vente faite à l’Église de Liège et qui formait dès lors des prétentions à l’héritage de ce duché[6]. Aussi Renaud ne tarda guère à exécuter ses projets ; en 1134, profitant des désordres qui régnaient à Liége sous l’épiscopat d’Alexandre I, le successeur indigne du bienheureux Albéron I, il parvint à s’emparer, par trahison, du château que l’Église de Liége ne récupéra qu’en 1141, lorsque Albéron II eut recours à la force des armes pour se faire rendre une place considérée comme imprenable. Cet événement, célébré comme un miracle dû à la protection de saint Lambert, a fait l’objet d’une ample narration écrite par un auteur contemporain[7].

Albéron I mourut, selon le nécrologe de Saint-Lambert et Gilles d’Orval, le 1er janvier 1128, c’est-à-dire, selon le nouveau style, 1129. Comme l’histoire de la maison de Louvain nous permet de placer sa naissance vers l’an 1060, il en résulte qu’il devait avoir atteint la soixante-dixième année de son âge. Son corps fut inhumé dans l’église de Saint-Gilles, au pied du maître-autel, où l’on consacra, en 1568, l’inscription suivante à sa mémoire :

D. O. M. ET MEMORIÆ DOMINI ALBERONIS, HUJUS NOMINIS PRIMI, EPISCOPI ET PRlNCIPIS LEODIENSIS, HENRICI II COMITIS LOVANII ET ODILIÆ[8] LANTGRAVII THURINGIÆ. SORORIS FILII, HUJUS ABBATIÆ SANCII ÆGIDII PRlMARII FUNDATORIS. OBIIT ANNO DOMINI MCXXVIII, CALENDIS FEBRUARII[9]. DOMINUS JOHANNES DE NOLLET, ABBAS OPTIMI ΡΑΤRΟΝΙ MONUMENTUM ANNO MDLXVIII IGNE CORRUPTUM HOC NOVO RESTAURAVIT AN. MDCXLVI MENSIS FEBRUARII DIE XXIV.

P. F. X. de Ram.
  1. Magnum Chron. Belg. apud Pistorium, t. III, p. 167.
  2. Ibid.
  3. Chapeauville (t. II, p. 100) a publié cet acte, mais il l’attribue par erreur à Albéron II, qui siégea à Liége de 1136 à 1145.
  4. Marlot, Metropolis Remensis hist., t. II, p. 294.
  5. Notat Fisen, ultima ejus vitœ primis et conceptœ de illo existimationi non respondisse ferri ; sed id quo fundamento ? cum testis oculatus Rudulphus post ejus obitum jamjam descripta referat (c’est-à-dire le portrait mentionné plus haut, not. 1, p. 7). Vovez Gallia Christ. nov., t. III, p. 868.
  6. Voyez Foullon, Hist. Leod., t. I, p. 261.
  7. Triumphus S. Lamberti martyris de castro Bultonio anno Domini 1141, publié par Chapeauville, t. II, pp. 577-602, qui attribue cette narration à Nicolas, chanoine de Liége, auteur d’une Vie de saint Lambert.
  8. Lisez Adelœ ou Adeliœ. Voyez nos Recherches sur l’hist. des comtes de Louvain et sur leurs sépultures à Nivelles, p. 44.
  9. C’est par erreur qu’on écrit februarii au lieu de januarii.