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Bruxelles fît aux gouverneurs généraux, lorsqu’ils entraient dans l’exercice de leur charge, un présent de vingt-cinq mille florins : le magistrat ayant convoqué les doyens des métiers pour leur proposer d’en gratifier don Francisco-Antonio de Agurto, il n’y eut, dans cette assemblée, où siégeaient près de trois cents personnes, pas une seule voix qui s’y montrât contraire ; trois des neuf nations, celles de Saint-Nicolas, de Saint-Laurent et de Saint-Christophe, voulurent même au don de la ville joindre chacune un don particulier, en témoignage de leur affection pour celui à qui la direction des affaires de l’État venait d’être confiée. Depuis deux ans, la ville d’Anvers faisait des difficultés pour accorder les subsides ; elle les vota peu après qu’Agurto eut pris les rênes du gouvernement ; les états de Namur lui donnèrent aussi une marque de déférence, en accordant une aide plus considérable qu’ils ne l’avaient fait dans aucune des années précédentes. Un acte de désintéressement d’Agurto ajouta à l’opinion avantageuse que le public avait conçue de lui : Informé, par des lettres d’Espagne, que le roi avait résolu de renvoyer aux Pays-Bas le duc de Villa-Hermosa (voir ce nom), qui les avait gouvernés de 1675 à 1680, il en avertit le magistrat de Bruxelles, l’engageant à réserver pour le duc les vingt-cinq mille florins qu’on lui destinait, afin que la ville n’eût pas à supporter deux fois cette dépense. Cependant Villa-Hermosa n’accepta point le poste auquel il était rappelé, et Charles  II, le 30 décembre 1685, nomma, par provision, lieutenant gouverneur et capitaine général des Pays-Bas don Francisco-Antonio de Agurto, à qui il conféra en même temps le titre héréditaire de marquis de Gastañaga. Le même jour, il donna avis de cette nomination aux états des provinces. Dans leur réponse (24 janvier 1686), les états de Brabant assurèrent le roi qu’ils étaient prêts à rendre au nouveau gouverneur « tous les honneurs, respect, assistance et zèle que ce caractère requéroit, et à quoi leur propre affection les portoit, par les fortes espérances dans lesquelles ils étoient, de voir effectuer en ce gouverneur plusieurs grandes pensées qu’il avoit pour le bien de leur province. »

Le marquis de Gastañaga fit son entrée solennelle à Bruxelles le 2 février : le magistrat, qui était allé l’attendre à la porte de Laeken, lui présenta les clefs de la ville. Avant de se rendre au palais, où il devait établir sa résidence, il assista, à Sainte-Gudule, à un Te Deum auquel présida l’archevêque de Malines. Les premiers temps de son administration furent employés par lui à visiter les places du Brabant et de la Flandre, à en faire réparer et à en augmenter les fortifications ; il consacra aussi ses soins aux affaires de la justice et au régime intérieur du pays.

Par la convention de Ratisbonne (août 1684), une trêve de vingt ans avait été conclue entre l’Espagne et la France ; mais déjà, en 1688, l’irruption des Français dans le Palatinat faisait prévoir qu’elle serait bientôt rompue. Le 21 avril de l’année suivante arriva à Bruxelles un officier envoyé par le maréchal d’Humières au gouverneur général des Pays-Bas, pour le prévenir que le Roi Très-Chrétien avait déclaré la guerre à Sa Majesté Catholique, et qu’en conséquence, les hostilités commenceraient incessamment. Gastañaga prit aussitôt ses mesures de concert avec le prince de Waldeck, commandant en chef des troupes des Provinces-Unies. Au mois d’avril, il partit pour l’armée, après s’être rendu successivement au conseil d’État, au conseil privé et au conseil des finances, auxquels il recommanda les intérêts du roi et du pays pendant son absence de la capitale. À la suite de quelques escarmouches, les Français, sous les ordres du maréchal d’Humières, ayant, le 26 août, attaqué les troupes hollandaises qui étaient campées à Walcourt, dans la province de Namur, furent repoussés avec une perte de plus de deux mille hommes restés sur le champ de bataille. Quelques jours après, Gastañaga fit avancer l’armée royale vers la ligne que les ennemis avaient élevée, depuis le pont d’Espierres sur l’Escaut jusqu’à Menin sur la Lys, et s’en rendit