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Guère plus haute qu’elle, et ronde, Dieu merci !
De soupe, de pain noir et de bon sans souci,
Dans son panier, où sont rose, lys, héliotrope,
Pressés comme le nègre en un vaisseau d’Europe,
Vint la vendre à Paris.

                   Voyez-vous maintenant
La villageoise, avec son bagage avenant.
Dans ce Palais-Royal que tant de foule inonde,
S’embusquer lestement autour de la rotonde ;

Puis à chaque passant gazouiller d’un air doux :

• J’aijJe jolis bouquets, monsieur, fleurissez-vous. *



Un jeune homme, pensif, suivait la galerie
Sans que rien d’alentour troublât sa rêverie ;

Un seul objet errait toujours devant ses yeux :

Car lorsque vous aimez, en tous temps, en tous lieux
Vous avez devant vous une image de femme,

Ombre de la beauté qui réside en votre âme.

Cependant il s’arrête un instant vers les fleurs.
Choisit la rose blanche entre toutes ses sœurs,

Y joint quelques boutons de jasmin, de grenade,
Puis avec son bouquet quitte la promenade.

—Madame, il va venir: arrondissez encor
Autour de votre cou la longue chaîne d’or ;
Arrangez vos cheveux, que la boucle incertaine
Autour de votre doigt roule en anneau d’ébène ;
Resserrez la ceinture, où viennent s’engager
Les deux bouts ondoyants de ce fichu léger ;

Madame, il va venir : à ce vase de Sèvres
D’un lait d’amande pur rafraîchissez vos lèvres ;

De l’eau de balsamine embaumez ce mouchoir ;
Baissez, baissez encor les rideaux du boudoir ;

Que de gaze et de soie une double barrière
Fonde en demi-lueur l’éclat de la lumière ;

Mais surtout que devant la mobile psyché
Plus d’une fois encor ce beau front soit penché :

A l’heure de l’attente, immobile sur place.

On regarde toujours la pendule ou la glace.

O bonheur! quand un bruit dans le cœur répété,
Une porte qui s’ouvre, un pas précipité.

Le doux son d’une voix dans la salle prochaine,
Annoncent que l’attente au moins ne fut pas vaine !