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George Sand, car c’était lui, avec cette admirable intelligence qui participe de l’intelligence des deux sexes, se trouva tout d’un coup aussi joyeux que le conscrit à sa première bataille. Elle avait déjà la main dans la giberne littéraire pour y chercher son bâton de maréchal de France. Figurez-vous, encore une fois, un joli petit jeune homme, d’un esprit audacieux, au vaste front prédo¬ minant et plein d’intelligence ; animé, curieux, sérieux, flâneur, heureux et fier d’être libre, comme l’enfant qui sort du collège, plein d’esprit, plein de passion, plein de cœur, plein d’avenir, mais ignorant de l’avenir, tel était George Sand. Vous pensez s’il fut ébloui par les passions de cette ville en révolution qui s’étaient soulevées comme fait la lave du volcan ; vous pensez s’il fut étourdi par le bruit de ces pavés qui remuaient encore ; vous pensez s’il alla tout voir, ces Tuileries désertes et vides encore, cette église de Saint-Germain-l’Auxerrois violée par une troupe de masques un jour de carnaval ; cette royauté nouvelle qui passait dans les rues, à cheval, sur ces mêmes pavés de juillet, étonnés de sentir encore le pied d’un roi. Jugez par vous-même si cet esprit ardent, qui, dans le calme d’une maison de province, avait rêvé à Paris tant de choses inouïes, fut étonné et confondu, quand il vit que même tous ses rêves étaient dépassés! Vous pensez si tout ce désordre social ne fut pas une immense fête remplie de joie, d’espérance et d’orgueil, pour cette âme en désordre, pour cet esprit révolté, et pour ce cœur qui ne se connaissait plus.

Ainsi était George Sand dans les premiers instants de son arrivée, j’ai presque dit de sa conquête. Il avait été saisi à son insu déjà, par l’enthousiasme des révolutions. 11 ne comprenait pas de plus grand plaisir que de fouler aux pieds tant de ruines subites qu’on eut dit amoncelées tout exprès pour lui servir de piédestal. Il était ivre