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une raison saine et un sentiment moral aussi pur qu’élevé dirigeaient vers le bien sa volonté et ses penchants ; et par une faveur que la Providence accorde parfois à celles qui lui ressemblent, il se trouva que les êtres qui avaient le plus de droit à ses affections étaient aussi ceux qui les méritaient le mieux. Sa sœur Pauline surtout, plus jeune et plus faible qu’elle, lui inspirait un attachement pour ainsi dire maternel, et qui ne fit que s’accroître avec les années. Occupée sans relâche de sa destinée, « elle aurait voulu la soulever de terre, de peur qu’une pierre ne heurtât son pied. » Pour elle, « jamais personne ne lui avait paru assez doux, assez soigneux, assez complaisant. » Sa tendre sollicitude était payée de retour ; rien n’altéra jamais entre les deux sœurs une si touchante amitié : la mort seule put la rompre.

Cette union, du reste, régnait entre tous les membres de la famille de Meulan : des cœurs aimants et des esprits occupés sont les meilleurs éléments d’une société paisible. Celle-là offrait aux deux sœurs tous les moyens de perfectionner les dons qu’elles avaient reçus de la nature. Mlle Pauline de Meulan, leur tante, se trouvait, par sa naissance et ses anciennes relations, en rapport avec ce qui restait de ce qu’avant la révolution on nommait la bonne compagnie, et par ses écrits, avec tout ce que la littérature d’alors comptait d’hommes distingués. Ainsi placée entre le grand monde et le monde littéraire, elle touchait encore au monde artiste par l’alliance de sa famille avec celle de M. Turpin de Crissé, amateur des arts et peintre distingué. Ses jeunes nièces devaient se développer rapidement dans cette favorable atmosphère, au milieu de ce mouvement des idées, qui est à la santé de l’esprit ce que l’exercice est à celle du corps.

En 1812, le mariage de M. Guizot avec Mlle de Meulan vint jeter au milieu de ce doux échange de sentiments af-