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La franchise et l’aisance du caractère de Junot lui attirèrent des amitiés ardentes que ne purent éteindre les accès d’une irritabilité facilement excitée chez lui par les apparences d’un tort. A peine avait-il soupçonné un oubli dans les objets relatifs au service, qu’il témoignait son mécontentement d’une manière fort dure, excusable en cela qu’il n’avait aucune partialité, et qu’il frappait du même anathème ceux même qu’il affectionnait le plus. Beaucoup d’inimitiés lui sont venues de cette sévé¬ rité, juste pourtant ; mais il dédaignait l’art des ménage¬ ments et n’en concevait pas de nécessaires pour ceux qui avaient encouru ses reproches. ’

Mais ce qu’il faut dire et proclamer, c’est son amour pour la vérité,la beauté de son âme, sa générosité iné¬ puisable, qui pendant quinze ans fît tant d’heureux au¬ tour de lui, et la haute noblesse de son caractère.

Quant à son courage, il n’y a pas d’expression qui puisse en rendre toute la naïveté. Un trait de lui, digne des plus beaux temps antiques, vaudra mieux que toutes les phrases. Se trouvant à une batterie, Bonaparte de¬ manda quelqu’un qui eût une belle écriture ; Junot sortit des rangs et se présenta pour écrire une.lettre sous sa dictée : Junot se mit sur l’épaulement.même de la bat¬ terie. A peine avait - il terminé sa lettre, qu’une bombe lancée par les Anglais éclate à dix pas et le couvre de terre ainsi que la lettre. « Bien, dit en riant Junot, nous n’avions pas de sable pour sécher l’encre. »

Bonaparte arrêta son regard sur le jeune sergent ; il était calme et n’avait pas même tressailli : cette circon¬ stance décida sa fortune.

Junot était non-sculcmcnt un homme aussi grand que sa réputation, mais il joignait à ses hautes qualités mi¬ litaires un esprit distingué, ingénieux et tendre. De plus, son âme expansive ne rêvait que le bonheur de sa femme