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auront à soutenir contre l’envie, la haine, la médiocrité et la pauvreté meme, les hommes appelés à des destinées éclatantes ; il semble qu’il faille aux âmes puissantes la trempe de l’adversité pour apprendre plus tard à vain¬ cre même la fortune. Ces détails sont charmants et peints avec une ingénuité si réelle, qu’on a peine à se douter du rôle que son auteur a joué plus tard sur la scène du monde.

Parmi les jeunes officiers que Bonaparte avait pré¬ sentés à Mme de Permon, on en distinguait un remar¬ quable par sa franchise, son air ouvert, et surtout par son attachement à son général, attachement qui tenait presque de la passion ; cette affection trouvait pour s’exprimer des élans du cœur si.bien sentis, qu’ils ins¬ piraient pour lui une vive sympathie : Junot était son nom. Brave comme ces héros créés par l’imagination des poëtes, il portait déjà des stigmates de blessures qu’il avait reçues, gages d’une intrépidité qui se joignait chez lui au sang-froid et à la présence d’esprit.

Junot était né à Bussy-le-Grand, le24 septembre 1771, de bons bourgeois, vivant dans l’aisance. Avant 89, les bourgeois ne mettant pas leurs fils au service, Junot se destina au barreau ; il fit des études excellentes. Il avait à peine vingt ans, lorsque d’un bout de la France à l’au¬ tre s’éleva un cri de guerre… A ce cri, une voix sou¬ daine répondit comme si dans son sein elle m’avait été qu’endormie. Il entra dans ce fameux bataillon des vo¬ lontaires de la Côte-d’Or, qui fournit à l’empire tant de généraux et de grands officiers. Après la reddition de Longwy, ce bataillon fut dirigé sur Toulon, qu’il fallait reprendre aux Anglais. Junot était sergent de grenadiers: ce poste, premier degré de son élévation, lui fut con¬ féré par ses camarades, tous aussi braves que lui, et c’était un des plus doux souvenirs de sa vie.