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Le dispositif de l’expérience est le même dans les deux cas ; peut-être cependant faut-il, quand le sujet n’est pas hystérique, user de quelques précautions supplémentaires pour augmenter l’état de distraction, qui n’est point aussi intense que dans l’hystérie. En général, il ne suffit point de faire lire à une personne un livre intéressant, ou de la faire causer avec un tiers, pour que lorsqu’on lui prend la main, elle ne s’occupe point de ce qu’on va faire avec cette main ; malgré elle, son attention revient vers l’expérimentateur, au lieu de se fixer ailleurs, et il faut ici fortifier l’état de distraction par un artifice.

Celui que j’ai employé est si naturel qu’il viendra certainement à l’esprit de tous ceux qui voudront répéter mes observations. Nous allons voir que dans la plupart des expériences on oblige la main de la personne à se mouvoir spontanément en dehors de sa volonté. Le point important est d’éviter que la personne remarque ces mouvements spontanés de sa main ; car si elle s’en occupait, l’inconscience et l’automatisme disparaîtraient. Pour parer à cet inconvénient, il faut laisser croire que la main est continuellement inerte et passive, et que c’est l’expérimentateur qui, de temps en temps, pour les besoins d’une expérience qu’on n’explique pas, imprime à la main un mouvement. Cela suffit pour tranquilliser le sujet, qui dès lors abandonne sa main sans résistance, s’en désintéresse, et se trouve dans des conditions mentales excellentes pour que sa conscience se divise.

Après ces quelques mots préliminaires, nous allons indiquer rapidement les principales épreuves psychologiques qu’on peut faire subir au sujet.

C’est d’abord l’anesthésie par distraction. La personne distraite n’est point devenue absolument insensible comme une hystérique distraite, dont on peut traverser la peau ou lever le bras sans qu’elle s’en aperçoive ; sa sensibilité n’est pas détruite, mais la finesse de certaines de ses perceptions est bien diminuée ; deux pointes de compas appliquées sur la main et enlevées rapidement donnent la sensation d’une