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et des actes, etc. ; elle peut encore devenir l’origine d’un délire. Rien de tout cela n’a eu lieu chez nos sujets, nous ignorons pourquoi ; l’expérimentation suppose un certain nombre de conditions artificielles, souvent ignorées, qui aiguillent un phénomène dans une certaine direction, au milieu d’une foule de directions possibles ; nos expériences ont pris la direction du sens visuel ; l’idée suggérée par les sensations subconscientes a toujours été une idée visuelle, et souvent même une hallucination de la vue.

Je ne crois pas avoir notablement contribué à donner cette forme aux idées suggérées, car je suis resté bien longtemps sans la comprendre ; quand je faisais trois excitations, par exemple, sur une main anesthésique, le sujet répondait simplement à la question : « À quoi pensez-vous ? — Je pense au chiffre 3. » Cette réponse n’indiquait pas autre chose qu’une idée quelconque, peut-être même une idée abstraite. Mais peu à peu quelques réponses se précisèrent ; tel sujet disait : « Je pense à trois sous la forme de trois points. » Un autre disait : « Je vois des barres, des bâtons. » Un troisième : « Je vois des colonnes ». Je ne savais que penser de ces bizarreries, et je les mettais sur le compte de l’imagination des malades ; mais un jour, brusquement, je m’aperçus que le sujet voyait des points quand je le piquais, et qu’il voyait des bâtons ou des colonnes quand j’agitais son doigt anesthésique ; plus de doute, c’était une image visuelle de sa main ou de l’excitation qui lui apparaissait, et toutes mes expériences ultérieures vinrent confirmer mon interprétation.


II


Nous allons étudier deux points principaux :

1o Quelles sont les excitations inconscientes qui peuvent impressionner indirectement la conscience normale du sujet ;

2o Sous quelle forme ces excitations pénètrent dans cette conscience.