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le même dispositif expérimental ; elle est environ deux fois et demie plus longue, et plus lisse, plus régulière.

D’autre part le chiffre maximum de pression est moins considérable que dans le premier cas, et on voit en effet que la courbe ne s’élève pas autant au-dessus de la ligne des abscisses ; on pourrait donc supposer qu’il y a là une compensation, et que si le sujet essayait de maintenir une pression légère avec sa main sensible, il arriverait à reproduire la courbe de contraction de la main anesthésique ; mais ce serait une erreur ; j’ai pu m’en convaincre.

La vraie raison pour laquelle la courbe de contraction donnée par la main anesthésique est la plus longue est une raison d’ordre psychologique ; la longueur de la courbe tient à l’absence de sensation de fatigue ; c’est la sensation de fatigue qui d’ordinaire, chez un sujet de bonne volonté, met un terme, par son caractère déprimant, à un effort longtemps continué ; la fatigue intervient bien avant l’épuisement musculaire et nous en garantit. Dans une conscience secondaire étroite, la sensation de fatigue ne se produit pas, ou du moins, si elle se produit, elle n’est pas aussi nette, aussi intense, aussi bien coordonnée avec les mouvements du bras que dans une conscience large et riche ; elle n’avertit pas le sujet, elle ne fait pas cesser l’état de contraction. Le prolongement de cet état est donc, comme tous les autres caractères que nous avons signalés, la marque d’une forme inférieure de la conscience.

Il résulte de ce qui précède qu’on trouve en germe, dans les contractions de la main insensible, les caractères des contractures hystériques spontanées ou provoquées ; ces caractères sont : 1o un état de demi-contraction, car quand un membre est contracturé, on peut encore augmenter la contracture par la faradisation (Richer) et de plus le bruit musculaire du muscle contracturé est plus faible que celui du muscle en état de contraction volontaire (Boudet de Paris et Brissaud) ; 2o quand on exerce une traction sur un membre contracturé, il cède à la traction, mais bien plus lentement qu’un membre raidi par la volonté ;