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deux mouvements volontaires ; on l’oblige à partager son attention entre les deux actes ; et c’est pour ce motif qu’il donne une pression faible. C’est là, ce nous semble, une démonstration excellente des idées émises par M. Pierre Janet sur le rétrécissement du champ de la conscience chez les hystériques. Nous avons déjà parlé de ce rétrécissement, à propos de la distraction ; nous donnons maintenant, pour la première fois peut-être, une preuve matérielle de sa réalité.

2o Temps physiologique de réaction. — L’anesthésie produit un allongement du temps physiologique de réaction pour les mouvements volontaires.

Duchenne (de Boulogne) a mis le fait en relief dans une expérience très nette et bien simple, une vraie expérience clinique. On prie un sujet hémianesthésique de rapprocher ses deux mains et de les ouvrir et fermer simultanément. Le sujet doit avoir les yeux fermés. Le plus souvent, une des deux mains est en retard sur l’autre ; c’est la main anesthésique. Mais les résultats varient un peu suivant les sujets, et suivant les conditions où on les place.

En général quand les yeux sont ouverts, les mouvements des deux mains sont à peu près simultanés ; ceci tient à ce que le sujet porte de préférence son attention et son regard sur la main anesthésique, dont il hâte en quelque sorte le mouvement. Mais si on lui ferme les yeux, la simultanéité des mouvements est gravement compromise. Presque toujours, chez les malades que nous avons observés, le retard de la main anesthésique devient très appréciable à une inspection sommaire ; tantôt elle exécute un nombre de mouvements égal à celui de la main sensible, mais avec un retard constant ; tantôt elle diminue le nombre de ses mouvements, et ne se fermera par exemple que cinq fois pendant que la main sensible se ferme douze à quinze fois ; ces mouvements de la main anesthésique sont souvent incomplets ; la fermeture du poing est à peine esquissée, et les ongles ne se cachent pas dans la paume de la main ; il peut arriver, par exagération du phénomène précédent, que la main anesthésique reste immobile, alors que le sujet, qui a les yeux